Actualité sociale du 25 novembre 2022
Le texte du
projet de loi « portant mesures d’urgence relatives au fonctionnement du marché du travail en vue du plein emploi » a été définitivement adopté par le Parlement le 17 novembre.
Parmi les mesures adoptées, on retiendra les suivantes :
Refus de CDI privant le salarié de droit à l’assurance chômage
Lorsque l’employeur propose que la relation contractuelle de travail se poursuive après l’échéance du terme d’un CDD (ou l’entreprise utilisatrice à l’issue d’une mission de travail temporaire) sous la forme d’un CDI :
- Pour occuper le même emploi, ou un emploi similaire ;
- Assorti d’une rémunération au moins équivalente ;
- Pour une durée de travail équivalente ;
- Relevant de la même classification ;
- Et sans changement du lieu de travail…
…il notifie cette proposition par écrit au salarié.
En cas de refus du salarié, l’employeur en informe Pôle emploi en justifiant du caractère similaire de l’emploi proposé (
C. trav., art. L. 1243-11-1). S’il est constaté qu’un demandeur d’emploi a refusé à deux reprises, au cours des 12 mois précédents, une proposition de CDI dans ces conditions, le bénéfice de l’allocation d’assurance chômage ne peut lui être ouvert que s’il a été employé dans le cadre d’un CDI au cours de la même période.
Ces dispositions ne s’appliquent pas lorsque la dernière proposition adressée au demandeur d’emploi n’est pas conforme aux critères prévus par le projet personnalisé d’accès à l’emploi si celui-ci a été élaboré antérieurement à la date du dernier refus pris en compte (
C. trav., art. L. 5422-1).
Abandon de poste valant démission
Nouvelle présomption de démission : le salarié qui a abandonné volontairement son poste et ne reprend pas le travail après avoir été mis en demeure de justifier son absence et de reprendre son poste, par lettre recommandée ou par lettre remise en main propre contre décharge, dans le délai fixé par l’employeur (qui ne peut être inférieur à un minimum qui sera fixé par décret),
est présumé avoir démissionné à l’expiration de ce délai.
Contestation : le salarié qui conteste la rupture de son contrat de travail sur le fondement de cette présomption
peut saisir le conseil de prud’hommes. L’affaire est directement portée devant le bureau de jugement, qui se prononce sur la nature de la rupture et les conséquences associées. Il statue au fond dans un délai d’un mois à compter de sa saisine (
C. trav., art. L. 1237-1-1).
CDD « multi-remplacements »
Création par la loi Avenir : la
loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel (L. n° 2018-771) avait prévu la possibilité, à titre expérimental, sur la période du 1er janvier 2019 au 31 décembre 2020,
de conclure un seul CDD pour remplacer plusieurs salariés dans des secteurs qui devaient être définis par décret. Il pouvait s’agir du remplacement simultané de plusieurs salariés à temps partiel ou du remplacement successif de plusieurs salariés à temps plein ou partiel.
Le décret définissant les secteurs concernés n’ayant été publié que fin 2019 (
décret n°2019-1388 du 18 décembre 2019), une prolongation de l’expérimentation avait été annoncée, mais n’était jusqu’à présent jamais intervenue.
Elle a donc pris fin le 31 décembre 2020.
Relance de l’expérimentation : le texte de la loi prévoit donc de « relancer » l’expérimentation, dans les mêmes termes qu’en 2018 :
- Dans les secteurs définis par décret, un seul contrat à durée déterminée (ou un seul contrat de mission) peut être conclu pour remplacer plusieurs salariés ;
- L’expérimentation ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise.
Pour mémoire, les secteurs d’activité définis par le décret de 2019 étaient : le sanitaire, social et médico-social, la propreté et nettoyage, l’économie sociale et solidaire, le tourisme en zone de montagne, le commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire, la plasturgie, la restauration collective, le sport et équipements de loisirs, le transport routier et activités auxiliaires, les industries alimentaires ainsi que les services à la personne.
La durée de l’expérimentation est de 2 ans à compter de la publication du décret définissant les secteurs concernés.
Électorat aux élections professionnelles
Exclusion par la jurisprudence des salariés assimilés au chef d’entreprise
La jurisprudence de la Cour de cassation a complété, dans une interprétation ancienne et constante de sa chambre sociale, les conditions légales pour être électeur et élu aux élections professionnelles. Sont ainsi privés du droit de vote, et par conséquent de celui d’être élus, les salariés qui,
« en raison des pouvoirs qu’ils détiennent, peuvent être assimilés au chef d’entreprise » (
Cass. soc., 1er avril 1997, n° 96-60.019), afin d’éviter de « placer les intéressés dans la position contradictoire de participer à la vie de telle ou telle institution ».
Plus précisément, la jurisprudence exclut pour ce motif les salariés qui :
- Disposent d’une délégation écrite particulière d’autorité leur permettant d’être assimilés au chef d’entreprise,
Ou représentent effectivement l’employeur devant les institutions représentatives du personnel (Cass. soc., 31 mars 2021, n° 19-25.233) ;
- Les dispositions légales, ainsi interprétées, ont eu pour conséquence de priver, par le simple motif de disposer d’une délégation d’autorité ou d’un pouvoir de représentation, certains salariés de la faculté de participer aux élections professionnelles. Ils étaient par conséquent, exclus de l’application du principe de participation des travailleurs.
Censure du Conseil constitutionnel : dans sa décision n° 2021-947 QPC du 19 novembre 2021, le Conseil constitutionnel a donc censuré l’
article L. 2314-18 du Code du travail relatif aux conditions requises pour être électeur aux élections professionnelles. Au regard des conséquences qu’aurait emporté une abrogation immédiate des dispositions en question,
le Conseil constitutionnel a différé les effets de sa décision dans le temps et reporté l’abrogation de l’article L. 2314-18 du Code du travail au 1er novembre 2022.
Nouvelle rédaction du texte : la nouvelle rédaction inscrite dans le texte permet de garantir la participation de l’ensemble des salariés à ces élections, y compris ceux assimilés au chef d’entreprise. En revanche, conformément à une jurisprudence ancienne de la Cour de cassation,
le texte confirme, par ailleurs, l’inéligibilité de ces derniers.
Ces dispositions seront rétroactivement applicables depuis le 31 octobre 2022.
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Service de santé au travail
Le
décret n° 2022-1434 du 15 novembre 2022 fixe les règles d’élaboration, d’accessibilité et de conservation des dossiers médicaux en santé au travail.
Le
décret n° 2022-1435 du 15 novembre 2022 détermine les modalités relatives à l’agrément et aux rapports d’activité des services de prévention et de santé au travail.
Homologation d’un PSE : quels sont les éléments contrôlés par l’administration quant à la consultation préalable du CSE ?
D’une part, lorsqu’elle est saisie par un employeur d’une demande d’homologation d’un document unilatéral fixant le contenu d’un plan de sauvegarde de l’emploi,
il appartient à l’administration de s’assurer, sous le contrôle du juge de l’excès de pouvoir, que la procédure d’information et de consultation du comité d’entreprise, et désormais du comité social et économique,
a été régulière et que cette procédure a été menée à son terme avant toute mise en œuvre de la réorganisation projetée.
Elle ne peut légalement accorder l’homologation demandée que si le comité a été mis à même d’émettre régulièrement un avis, d’une part sur l’opération projetée et ses modalités d’application et, d’autre part, sur le projet de licenciement collectif et le plan de sauvegarde de l’emploi.
Il appartient à ce titre à l’administration de s’assurer,
sous le contrôle du juge de l’excès de pouvoir, seul compétent, qu’aucune décision de cessation d’activité ou de réorganisation de la société, expresse ou révélée par un acte quelconque, n’a été prise par l’employeur avant l’achèvement de la procédure d’information et de consultation des instances représentatives du personnel et que l’employeur a adressé au comité, avec la convocation à sa première réunion, ainsi que, le cas échéant, en réponse à des demandes exprimées par le comité,
tous les éléments utiles pour qu’il formule ses deux avis en toute connaissance de cause, dans des conditions qui ne sont pas susceptibles d’avoir faussé sa consultation.
D’autre part, l’obligation qui incombe à l’administration d’envoyer copie au comité d’entreprise des observations qu’elle adresse à l’employeur, ainsi que celle qui incombe à l’employeur d’envoyer copie de ses réponses aux représentants du personnel,
visent à ce que le comité d’entreprise dispose de tous les éléments utiles pour formuler ses avis en toute connaissance de cause. Il en va de même pour les injonctions adressées par l’administration à l’employeur.
Enfin, lorsque l’entreprise appartient à un groupe et que l’employeur est, par suite, amené à justifier son projet au regard de la situation économique du secteur d’activité dont relève l’entreprise au sein de ce groupe,
les éléments d’information adressés par l’employeur aux instances représentatives du personnel doivent porter non seulement sur la situation économique du secteur d’activité qu’il a lui-même pris en considération, mais aussi
sur les raisons qui l’ont conduit à faire reposer son analyse sur ce secteur d’activité. L’employeur, qui informe et consulte les représentants du personnel n’est pas tenu d’adresser des éléments d’information relatifs à la situation économique d’un autre secteur d’activité que celui qu’il a retenu.
CE, 15 novembre 2022, n°444480
Transfert d’un salarié protégé : la suspension de son contrat de travail n’y fait pas obstacle
Lorsqu’elle est saisie d’une demande d’autorisation du transfert du contrat de travail d’un salarié protégé présentée en application de ces dispositions,
il appartient à l’autorité administrative, en premier lieu, de vérifier que les dispositions de l’
article L. 1224-1 du Code du travail sont applicables au transfert partiel d’entreprise ou d’établissement en cause, ce qui suppose qu’il concerne une entité économique autonome. Tel est le cas lorsqu’est transféré un ensemble organisé de personnes et d’éléments corporels et incorporels permettant l’exercice d’une activité qui poursuit un objectif propre, conservant son identité, et dont l’activité est poursuivie par le nouvel employeur.
Lorsque les dispositions de l’article L. 1224-1 du Code du travail sont applicables, l’autorité administrative doit, en second lieu,
contrôler que le salarié protégé susceptible d’être transféré ne fait pas l’objet à cette occasion d’une mesure discriminatoire. À ce titre, elle doit s’assurer, d’une part, que le contrat de travail du salarié protégé est en cours au jour de la modification intervenue dans la situation juridique de l’employeur, d’autre part, que ce salarié exerce ses fonctions dans l’entité transférée à la date du transfert de l’activité en cause, sans que la circonstance que son contrat du travail soit alors suspendu y fasse obstacle.
La suspension du contrat de travail du salarié protégé
ne fait pas obstacle à ce qu’il soit regardé comme exerçant ses fonctions dans l’entité transférée.
CE, 28 octobre 2022, n°454338