Zoom sur l’actualité jurisprudentielle en matière d’inaptitude au travail 

L’essentiel de l’actualité concerne quatre récentes décisions rendues par la Chambre sociale de la Cour de cassation en la matière, chacune traitant d’un point différent, partant de la déclaration d’inaptitude au licenciement du salarié pour inaptitude physique et impossibilité de reclassement.

Que faut-il retenir des décisions de justice rendues ?

1 – L’inaptitude peut être constatée lors d’une visite tenue pendant une suspension du contrat

Dans une première décision en date du 5 juillet 2023, la Chambre sociale rappelle qu’ Aux termes du code du travail, après avoir procédé ou fait procéder par un membre de l’équipe pluridisciplinaire à une étude de poste et après avoir échangé avec le salarié et l’employeur, le médecin du travail qui constate qu’aucune mesure d’aménagement, d’adaptation ou de transformation du poste de travail occupé n’est possible et que l’état de santé du travailleur justifie un changement de poste déclare le travailleur inapte à son poste de travail.
L’avis d’inaptitude rendu par le médecin du travail est éclairé par des conclusions écrites, assorties d’indications relatives au reclassement du travailleur.

Le même code, dans sa rédaction issue du Cass. soc., 5 juillet 2023, n°21-25.797 , dispose qu’indépendamment des examens d’aptitude à l’embauche et périodiques ainsi que des visites d’information et de prévention, le travailleur bénéficie, à sa demande ou à celle de l’employeur, d’un examen par le médecin du travail et que le travailleur peut solliciter notamment une visite médicale, lorsqu’il anticipe un risque d’inaptitude, dans l’objectif d’engager une démarche de maintien en emploi et de bénéficier d’un accompagnement personnalisé.

La Cour précise qu’il résulte de la combinaison de ces textes que le médecin du travail peut constater l’inaptitude d’un salarié à son poste à l’occasion d’un examen réalisé à la demande de celui-ci, peu important que l’examen médical ait lieu pendant la suspension du contrat de travail.

Cass. soc., 24 mai 2023, n°22-10.517

2 – L’obligation de reclassement naît à la date de la déclaration d’inaptitude

Dans une seconde espèce, la Chambre sociale précise la date à retenir comme point de départ de l’obligation de recherche pour tenter de reclasser le salarié déclaré inapte.

La Cour précise que l’obligation qui pèse sur l’employeur de rechercher un reclassement au salarié déclaré par le médecin du travail inapte à reprendre l’emploi qu’il occupait précédemment naît à la date de la déclaration d’inaptitude par le médecin du travail.

Les dispositions issues de l’ordonnance n°2017-1387 du 22 septembre 2017 (notamment relatives aux recherches de reclassement dans le groupe) ne sont pas applicables aux salariés déclarés inaptes avant son entrée en vigueur.

 Cass. soc., 5 juillet 2023, n°21-24.703

3 – Définition du groupe de reclassement

Selon le code du travail, dans sa rédaction issue de l’ordonnance n° 2017-1718 du 20 décembre 2017, la notion de groupe [pour la recherche de reclassement du salarié inapte] désigne une entreprise appelée entreprise dominante et les entreprises qu’elle contrôle, dans les conditions définies à l’article L. 233-1, aux I et II de l’article L. 233-3 et à l’article L. 233-16 du code de commerce.

Selon l’article L. 233-16 du code de commerce, les sociétés commerciales établissent et publient chaque année des comptes consolidés dès lors qu’elles contrôlent de manière exclusive ou conjointe une ou plusieurs autres entreprises.
Il résulte de la combinaison des articles L. 233-17-2 et L. 233-18 du code de commerce que sont comprises dans les comptes consolidés, par mise en équivalence, les entreprises sur lesquelles l’entreprise dominante exerce une influence notable, laquelle n’est pas constitutive d’un contrôle au sens des articles L. 233-1, L. 233-3, I et II, ou L. 233-16 du code de commerce.

La Chambre sociale a ici cassé l’arrêt rendu par la Cour d’appel, considérant que les juges du fond n’ont pas constaté que les conditions du contrôle au sens des articles L. 233-1, L. 233-3, I et II, ou L. 233-16 du code de commerce étaient réunies.
La Cour d’appel qui, pour retenir l’existence d’un groupe de reclassement, se borne à constater que la société dont l’appartenance au groupe est contestée est incluse dans le groupe au titre des sociétés consolidées par mise en équivalence et qu’elle fait partie des filiales du groupe avec une participation de 48,66 %, a privé sa décision de base légale.

Cass. soc., 5 juillet 2023, n°22-10.158

4 – Licenciement du salarié inapte pour impossibilité de reclassement

Enfin, la Chambre sociale ajoute que, la non reprise du paiement du salaire à l’issue du délai d’un mois n’entraine pas le versement de l’indemnité compensatrice de préavis.

Il résulte du code du travail qu’en cas de licenciement pour inaptitude consécutive à une maladie ou un accident non professionnel et impossibilité de reclassement, le préavis n’est pas exécuté, et cette inexécution ne donne pas lieu au versement d’une indemnité compensatrice.

Ainsi, doit être cassé l’arrêt qui retient que cette indemnité est due en cas de non reprise du paiement du salaire à l’issue du délai d’un mois, alors qu’il constate par ailleurs que le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse.

Cass. soc., 5 juillet 2023, n°21-25.797

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Article rédigé par La Team Capstan avocats

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