Accidents de trajet et maladies professionnelles : éclairages de la Cour de cassation
Définition et portée des accidents de trajet
Selon l’article L.411-2 du code de la sécurité sociale, l’accident survenu pendant le trajet entre la résidence du salarié et le lieu de travail est considéré comme un accident devant être pris en charge au titre de la législation professionnelle.
Cas pratique : Reconnaissance d’un accident de trajet
Dans une décisions du 29 février 2024, la 2e Chambre civile de la Cour de cassation qualifie la chute d’un salarié alors qu’il était sorti devant son domicile pour déneiger son véhicule en un accident de trajet.
En l’espèce, la victime a déclaré avoir fait une chute, alors qu’elle était sortie de son domicile, pour procéder au déneigement et au dégagement de son véhicule garé sur une place extérieure située devant celui-ci. L’heure de survenance des faits est compatible avec les nécessaires précautions prises par la victime pour anticiper les difficultés de circulation inévitables en cas d’intempéries et être en mesure de se présenter sur le lieu de son travail à son horaire habituel de prise de poste. Ensuite, les lésions de la victime, constatées le jour-même et imputées à sa chute, sont compatibles avec sa relation des faits. Enfin, la victime n’a pas interrompu ou détourné son trajet entre la sortie de son domicile et le lieu de son travail pour un motif dicté par son intérêt personnel et étranger aux nécessités essentielles de la vie courante.
Est donc approuvée la décision de la cour d’appel qui, ayant estimé que le salarié avait quitté sa résidence et les dépendances de celle-ci, retient que l’accident était survenu sur le trajet du salarié pour se rendre à son travail et devait être pris en charge au titre de la législation professionnelle.
Cass. civ., 2e, 29 février 2024, n°22-14.592
Focus sur le tableau n°30 bis et les maladies professionnelles
Dans un arrêt du même jour, la Cour de cassation s’est prononcée sur les travaux susceptibles de provoquer une MP et indique que le tableau n°30 bis est d’application stricte.
Il résulte de l’article L. 461-2 du Code de la Sécurité sociale et du tableau n° 30 bis des maladies professionnelles que la condition tenant à la liste limitative des travaux n’est remplie que si la victime a personnellement effectué l’un des travaux énumérés par ce tableau, qui est d’interprétation stricte.
Cass. civ., 2e, 29 février 2024, n°21-20.688
Obligations d’information de l’employeur par la CPAM
Autre point à retenir concernant l’obligation préalable d’information de l’employeur par la caisse ; elle ne s’applique pas à l’instruction des réclamations devant la CRA !
Selon le Code de la Sécurité sociale (art. R. 441-14, alinéa 3, dans sa rédaction issue du décret n° 2009-938 du 29 juillet 2009), dans le cas où elle a procédé à une instruction, la caisse communique à la victime ou à ses ayants droit et à l’employeur au moins 10 jours francs avant de prendre sa décision, par tout moyen permettant d’en déterminer la date de réception, l’information sur les éléments recueillis et susceptibles de leur faire grief, ainsi que sur la possibilité de consulter le dossier.
Cette obligation d’information de l’employeur, à la charge de la CPAM, ne s’applique pas à l’instruction des réclamations devant la commission de recours amiable dont l’employeur peut ultérieurement contester la décision devant une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale.
Cass. civ., 2e, 29 février 2024, n°22-14.424
Procédures d’information et obligations de la CPAM
Enfin, la Cour de cassation précise que l’organisme de Sécurité sociale n’a pas à procéder à deux envois distincts d’information pour satisfaire à son obligation après le début des investigations.
Il résulte du Code de la Sécurité sociale (art. R. 441-8 dans sa rédaction issue du décret n° 2019-356 du 23 avril 2019) que satisfait aux obligations d’information qui lui sont imposées la caisse qui, après avoir engagé des investigations, informe la victime ou ses représentants et l’employeur au cours de la période de 30 jours (visée au I de ce texte), tant de la date à laquelle elle rendra au plus tard sa décision, que des dates d’ouverture et de clôture des périodes qui leur seront ouvertes à l’issue des investigations pour, d’une part, consulter le dossier et, d’autre part, formuler des observations préalablement à sa décision.
En l’espèce, par lettre du 11 février 2020, la caisse a, d’une part, informé l’employeur de la réception du dossier complet le 7 février 2020 et de ce qu’elle entendait procéder à des investigations, d’autre part, précisé que lorsque les investigations seraient terminées, l’employeur pourrait consulter le dossier et formuler des observations du 20 avril au 4 mai 2020, et qu’au-delà de cette date, il ne pourrait que consulter le dossier jusqu’à la prise de décision devant intervenir au plus tard le 11 mai 2020.
Le Code de la Sécurité sociale n’impose pas à l’organisme de Sécurité sociale de procéder à deux envois distincts d’information et l’employeur a été en mesure de connaître notamment les dates auxquelles il pouvait consulter le dossier après la clôture des investigations, et formuler des observations, dans le respect du délai de 10 jours.
Dès lors la caisse a satisfait à son obligation d’information à l’égard de l’employeur.
Cass. civ., 2e, 29 février 2024, n°22-16.818