Délai de licenciement pour faute grave

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Délai du licenciement pour faute grave

La procédure de licenciement doit être mise en œuvre dans un délai restreint, excepté lorsque le salarié est absent de l’entreprise.

Qu’est-ce que la faute grave ?

La faute grave se définit comme un fait ou un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail, d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise.

La Cour de cassation a donc donné une définition précise de la faute grave, qu’elle caractérise par la réunion de trois éléments :

La faute grave résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié personnellement ;

  • Le ou les faits incriminés doivent constituer une violation d’une obligation contractuelle ou un manquement à la discipline de l’entreprise.
  • La violation reprochée au salarié doit être d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise.

Aucune autre condition n’est nécessaire, et particulièrement pas l’intention de nuire de la part du salarié, ni la preuve d’un préjudice particulier pour l’employeur.

Ainsi, pour être qualifié de faute grave, le comportement fautif du salarié doit être d’une importance telle qu’il rend impossible son maintien dans l’entreprise, et ce, même pendant la durée de son préavis. 

Mise en oeuvre et délai du licenciement pour faute grave

S’agissant de la mise en œuvre de la procédure disciplinaire, l’employeur doit, en principe, engager la procédure de rupture du contrat dans un délai restreint, après avoir été informé des faits allégués dès lors qu’aucune vérification n’est nécessaire.

La durée de ce délai restreint n’est pas fixée par le législateur ou le juge. Toutefois, il ressort de la jurisprudence que cela peut dépendre des circonstances dans lesquelles l’employeur a connaissance des agissements fautifs du salarié.

En pratique, la gravité de la faute s’apprécie au cas par cas, et si prises isolément certaines fautes commises par le salarié ne sont pas graves, elles peuvent le devenir par réitération ou par accumulation.

A titre d’exemples :

  • Un délai de 3 semaines avait été considéré comme tardif (Cass. Soc, 23 octobre 2012, n°11-23861).
  • Il avait été jugé que l’employeur avait bien agi dans le respect d’un délai restreint en engageant la procédure de licenciement un mois après avoir pris connaissance des faits concernant la politique commerciale et le comportement du salarié. Les agissements du salarié avaient été dénoncés par des lettres de collaborateurs les 9, 15 et 21 novembre 2010 et la procédure de licenciement avait été engagée le 10 décembre 2010 (Cass. Soc, 12 octobre 2016, n°15-20413).
  • Il avait été jugé encore que la procédure disciplinaire avait été engagée trop tardivement, l’employeur ayant laissé s’écouler un délai de 2 mois moins un jour entre la révélation des faits et l’engagement de la procédure : l’employeur avait eu connaissance des faits le 9 septembre 2013 et avait convoqué le salarié à un entretien préalable à licenciement le 8 novembre 2013 (Cass. Soc, 22 janvier 2020, n°18-530).

 Dans une affaire jugée le 9 mars 2022, la Cour de cassation a retenu que le fait pour l’employeur de laisser s’écouler un délai entre la révélation des faits et l’engagement de la procédure de licenciement ne peut avoir pour effet de retirer à la faute grave son caractère de gravité, dès lors que le salarié, dont le contrat de travail est suspendu, est absent de l’entreprise.

En l’espèce, une salariée était placée en arrêt de travail à compter du 31 mai 2013. L’employeur avait acquis une exacte connaissance des faits reprochés le 17 octobre 2014. Par lettre du 14 novembre 2014, l’employeur la convoqué à un entretien préalable au licenciement, lui reprochant des faits remontant à 2011 et 2012.

Elle était licenciée pour faute grave par lettre en date du 12 décembre 2014, soit 4 semaines plus tard.

Contestant son licenciement, elle a fait valoir que l’employeur avait tardé à mettre en œuvre la procédure de licenciement et ne pouvait plus invoquer la faute grave.

La Haute juridiction n’a pas donné raison à la salariée. Retenant que le contrat de travail était suspendu depuis le 31 mai 2013, la salariée étant absente de l’entreprise, le temps écoulé entre la connaissance des faits et l’engagement de la procédure ne pouvait avoir pour effet de retirer à la faute son caractère grave.

Cet arrêt apporte un éclairage intéressant et un axe de défense pour les employeurs en cas de suspension du contrat de travail.

Il reste cependant bien plus prudent, afin de sécuriser l’ensemble de la procédure de licenciement, d’engager la procédure disciplinaire, non seulement dans un délai qui soit incontestablement inférieur au délai légal de prescription des faits de deux mois, mais, mieux même, dans les meilleurs délais possibles, même dans de telles circonstances.

 

Cass. Soc, 9 mars 2022, pourvoi n°20-20872

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Article rédigé par La Team Capstan avocats

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