Actualité sociale du 7 juin 2024
[A l’international] L’employeur est responsable des erreurs RGPD faites par ses employés
Un récent arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) apporte un éclairage sur la question de savoir si un responsable du traitement des données peut être exonéré de sa responsabilité pour l’erreur d’une personne agissant sous son autorité.
Le règlement général sur la protection des données (RGPD) prévoit qu’un responsable du traitement ou un sous-traitant est exonéré de toute responsabilité en cas de violation du RGPD s’il prouve qu’il n’est en aucune façon responsable de l’événement ayant causé le dommage.
La CJCE a estimé que le responsable du traitement doit veiller à ce que ses employés suivent les instructions, et que cette disposition ne peut pas exonérer le responsable du traitement de sa responsabilité pour les violations causées par l’erreur d’un employé.
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Demande d’autorisation de licenciement pour exercice irrégulier du droit de retrait par un salarié protégé : quel contrôle de l’autorité administrative ?
Dans le cas où l’autorité administrative est saisie d’une demande d’autorisation de licenciement pour faute d’un salarié protégé au motif de l’exercice irrégulier du droit de retrait par le salarié, il lui appartient de rechercher, sous le contrôle du juge de l’excès de pouvoir, si le salarié justifiait d’un motif raisonnable de penser que la situation de travail présente un danger grave et imminent pour sa vie ou pour sa santé.
Lorsque tel est le cas, l’autorité administrative ne peut pas autoriser ce licenciement. Si tel n’est pas le cas, il appartient à l’administration, sous le contrôle du juge de l’excès de pouvoir, de rechercher, conformément à ce qui est dit au point 5, si le comportement du salarié est constitutif d’une faute d’une gravité suffisante pour justifier que son licenciement soit autorisé.
En l’espèce, M. B… a exercé, le 4 janvier 2018, son droit de retrait alors qu’il n’était qu’observateur des procédures de chargement et de déchargement en cours, au motif que l’employeur n’avait pas mis à sa disposition un » pull » et un » tee-shirt » en complément de sa veste et de son pantalon de protection, alors qu’il ressort de la notice des équipements de protection qu’il est seulement » souhaitable de porter sous (la) tenue EPI des matières qui ne risquent pas de fondre en cas d’élévation de température » et » déconseillé de porter la tenue à même la peau « . Il a fait usage du même droit de retrait le 8 janvier 2018 alors qu’il était à nouveau simple observateur des procédures, au motif que la tenue de protection mise à sa disposition, qu’il n’avait portée qu’une fois, était sale, alors que la notice du fabricant préconise seulement un nettoyage régulier de la tenue et qu’il ne ressortait pas des pièces du dossier qu’elle aurait été souillée par des liquides chimiques ou inflammables.
La cour administrative d’appel a jugé sans commettre d’erreur de droit ou d’erreur de qualification juridique, au vu des circonstances de fait de l’espèce qu’elle a souverainement appréciées, que l’inspecteur du travail avait pu retenir que les conditions prévues pour l’exercice du droit de retrait n’étaient pas satisfaites, de sorte que les agissements de M. B… présentaient un caractère fautif.
CE, 28 mai 2024, n°472007
La modification par DUE d’un régime frais de santé instauré par accord collectif, rendue nécessaire par la mise en conformité avec des dispositions législatives et conventionnelles nouvelles, ne rend pas caduc l’accord collectif antérieur relatif au cofinancement par les IRP de ce régime au titre des ASC
Le 27 octobre 2006, l’association et le syndicat CFDT ont signé un accord permettant aux salariés de bénéficier d’une assurance complémentaire « frais de santé ».
Un accord complémentaire signé ensuite en décembre 2006, définissant les compétences respectives du comité d’établissement et du comité central d’entreprise dans le domaine des activités sociales et culturelles, prévoit le cofinancement par le CCE de ce régime.
Un accord a ensuite été conclu, en 2009, entre le CCE et les comités d’établissement, afin de fixer les modalités de répartition du financement de cette participation à l’accord frais de santé.
En 2015, en raison de l’obligation légale de mettre en place une assurance santé collective à compter du 1er janvier 2016, l’employeur engage des négociations pour réviser les modalités de la complémentaire santé. Faute d’accord, il prend une décision unilatérale qui adapte le régime de prévoyance à compter de 2016. Par une nouvelle décision unilatérale du 20 décembre 2016, l’association a fixé les modalités de remboursement des frais de santé à effet du 1er janvier 2017.
Le CCE et les syndicats, assignent l’employeur afin de constater que l’accord du 27 octobre 2006 a été « mis à néant » par la 1ère DUE de 2015, de dire caducs les accords de décembre 2006 et de 2009 tels que reposant sur l’accord du 27 octobre 2006, de prononcer la nullité des deux DUE, à tout le moins en ce qu’elles mettent à la charge du CCE le règlement d’une partie des cotisations de la complémentaire santé, et de condamner l’association à rembourser au CCE et aux comités d’entreprise les sommes prélevées au titre du cofinancement de la complémentaire santé depuis la 1ère DUE. Ils obtiennent gain de cause en appel.
A tort selon la Cour de cassation : d’une part la dénonciation d’un accord collectif ne peut être implicite, et d’autre part le régime de prévoyance révisé par les DUE contestées se bornait à modifier le montant des cotisations mensuelles à la charge des salariés, ainsi que l’étendue de certaines garanties.
La modification par voie de décision unilatérale de l’employeur, après l’échec des négociations collectives, d’un régime d’assurance complémentaire « frais de santé », instauré par voie d’accord collectif, rendues nécessaires par la mise en conformité avec des dispositions législatives et conventionnelles nouvelles, ne prive pas de cause et ne rend pas dès lors caduc un accord collectif antérieur relatif au cofinancement par les institutions représentatives du personnel de ce régime complémentaire au titre des activités sociales et culturelles.
Cass. soc., 29 mai 2024, n°22-23.415
Expiration du détachement d’un fonctionnaire : l’employeur privé doit-il solliciter une autorisation administrative de mettre fin au contrat de travail ?
Selon la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986, alors applicable, à l’expiration de son détachement, le fonctionnaire est réaffecté dans l’emploi qu’il occupait antérieurement.
Il en résulte que l’employeur privé n’est pas tenu à l’expiration du détachement à son terme normal de solliciter une autorisation administrative de mettre fin au contrat de travail le liant au fonctionnaire détaché bénéficiant du statut protecteur, sauf lorsqu’il s’est opposé au renouvellement du détachement demandé par le fonctionnaire, ou que ce non-renouvellement est dû à son fait.
En l’espèce, l’association a pris l’initiative d’adresser une lettre demandant la réintégration de la salariée, membre de son CHSCT, dans son corps d’origine à l’expiration de la période du détachement. Lors de son retour de congés, la salariée a été convoquée par l’employeur qui lui a annoncé la fin du détachement et son refus de le renouveler au-delà de la période courante. Le détachement de la salariée n’a pas été renouvelé en raison du souhait de la direction de l’association d’instaurer une dynamique nouvelle au sein de l’équipe et du désaccord de l’intéressée sur les changements mis en place.
Le juge du fond en a exactement déduit que le renouvellement du détachement de la salariée était dû au fait de l’employeur, en sorte qu’à défaut pour ce dernier d’avoir sollicité l’autorisation de l’inspecteur du travail de mettre fin au contrat de travail, la violation du statut protecteur de l’intéressée était établie.
Droit de retrait : l’employeur peut opérer une retenue sur salaire sans recourir au juge s’il estime son exercice abusif
Aux termes du code du travail, le travailleur alerte immédiatement l’employeur de toute situation de travail dont il a un motif raisonnable de penser qu’elle présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé ainsi que de toute défectuosité qu’il constate dans les systèmes de protection. Il peut se retirer d’une telle situation.
L’employeur ne peut demander au travailleur qui a fait usage de son droit de retrait de reprendre son activité dans une situation de travail où persiste un danger grave et imminent résultant notamment d’une défectuosité du système de protection.
Aux termes du même code, aucune sanction, aucune retenue de salaire ne peut être prise à l’encontre d’un travailleur ou d’un groupe de travailleurs qui se sont retirés d’une situation de travail dont ils avaient un motif raisonnable de penser qu’elle présentait un danger grave et imminent pour la vie ou la santé de chacun d’eux.
Il résulte de ces dispositions que lorsque les conditions de l’exercice du droit de retrait ne sont pas réunies, le salarié s’expose à une retenue sur salaire, sans que l’employeur soit tenu de saisir préalablement le juge du bien-fondé de l’exercice de ce droit par le salarié.
Cass. soc., 22 mais 2024, n°22-19.849