FOCUS : Contentieux sécurité sociale octobre 2024

Cette semaine, trois principales décisions rendues en la matière par la Cour de cassation sont décryptées.

Synthèse des dernières décisions rendues par la Cour de cassation

1/ Indemnisation du préjudice résultant de la perte / diminution des possibilités de promotion professionnelle : la réparation d’une perte de chance n’est pas subordonnée à la preuve du caractère sérieux de la chance perdue

Dans une décision récente du 17 octobre 2024, pourvoi n°22-18905, la chambre sociale a rappelé que, selon le CSS (art. L. 452-3), indépendamment de la majoration de la rente qu’elle reçoit en vertu de l’article L. 452-2, la victime a le droit de demander à l’employeur devant la juridiction de sécurité sociale la réparation du préjudice résultant de la perte ou de la diminution de ses possibilités de promotion professionnelle.
Dès lors que la chance perdue est réelle et non hypothétique, toute perte de chance ouvre droit à réparation.

En l’espèce, pour rejeter la demande de la victime en indemnisation du préjudice résultant de la perte ou de la diminution des possibilités de promotion professionnelle, le juge du fond énonce qu’elle ne rapporte pas la preuve de perspectives sérieuses de promotion professionnelle.

A tort, dès lors que la réparation d’une perte de chance n’est pas subordonnée à la preuve du caractère sérieux de la chance perdue.

2/ Tarification AT/MP – Recours aux fins de contestation du taux : quand le délai de forclusion de 2 mois peut-il être opposé à l’employeur ?

Selon le CSS (art. L. 242-5), le taux de la cotisation due au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles est déterminé annuellement pour chaque catégorie de risques par la caisse d’assurance retraite et de la santé au travail d’après les règles fixées par décret.

Selon le CSS (art. R. 143-21 alinéa 1 ; R. 142-13-2 dans sa rédaction issue du décret n° 2018-928 du 29 octobre 2018 ; R. 142-1-A, III dans sa rédaction issue du décret n° 2019-1506 du 30 décembre 2019 successivement applicables au litige), le recours de l’employeur aux fins de contestation du taux de cette cotisation est introduit dans le délai de 2 mois à compter de la date de réception de la notification par cette caisse de sa décision fixant ce taux.

Dans une décision du 17 octobre 2024, pourvoi n°22-20.692, la Cour de cassation a indiqué que le délai de forclusion de 2 mois ne peut pas être opposé à l’employeur qui, sans attendre la notification du taux de la cotisation due au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles, demande le retrait de son compte employeur du coût d’une maladie professionnelle ou l’inscription de cette maladie sur le compte spécial en application de l’article 2 de l’arrêté interministériel du 16 octobre 1995, modifié.

En revanche, ce délai est opposable à l’employeur lorsque cette demande, qui ne peut avoir pour effet de modifier un taux devenu définitif, est formée à l’occasion d’un litige en contestation de ce taux. Il appartient, dès lors, à la juridiction de la tarification de rechercher si le taux de la cotisation en cause a été notifié et revêt un caractère définitif.

3/ Nullité de la mise en demeure : dans la même instance, l’organisme de recouvrement ne peut poursuivre le paiement des sommes qui en font l’objet

Dans une troisième décision en date du 17 octobre 2024, pourvoi n°21-25.851, la cour de cassation a rappelé que la notification d’une mise en demeure régulière constitue un préalable obligatoire aux poursuites, et la nullité de la mise en demeure fait obstacle à ce que, dans la même instance, l’organisme de recouvrement poursuive le paiement des sommes qui en font l’objet.

En l’espèce, selon l’arrêt attaqué (Montpellier, 27 octobre 2021), à la suite d’un contrôle portant sur les années 2013 à 2015, l’URSSAF de Midi-Pyrénées (l’URSSAF) a adressé à la société concernée une lettre d’observations comportant plusieurs chefs de redressement. Après observations de la société et réponse de l’inspecteur du recouvrement, l’URSSAF a ensuite notifié à la société une mise en demeure, puis lui a décerné une contrainte le 3 février 2017.

La société fait grief à l’arrêt de valider le redressement opéré par l’URSSAF et de la condamner à payer à cette dernière une certaine somme, alors :

  • qu’aux termes de l’article L. 244-2 du code de la sécurité sociale, toute action ou poursuite effectuée en application de l’article L. 244-1 ou des articles L. 244-6 et L. 244-11 est obligatoirement précédée, d’une mise en demeure adressée à l’employeur l’invitant à régulariser sa situation dans le mois ; que la nullité de la mise en demeure prive de fondement l’obligation au paiement des sommes qui en font l’objet de sorte que l’URSSAF ne peut solliciter l’examen du bien-fondé des redressements contestés ;
  • subsidiairement, qu’aux termes de l’article L. 244-2 du code de la sécurité sociale, toute action ou poursuite effectuée en application de l’article L. 244-1 ou des articles L. 244-6 et L. 244-11 est obligatoirement précédée d’une mise en demeure adressée à l’employeur l’invitant à régulariser sa situation dans le mois.

Réponse de la Cour : « Il résulte de ces textes que la notification d’une mise en demeure régulière constitue un préalable obligatoire aux poursuites et que la nullité de la mise en demeure fait obstacle à ce que, dans la même instance, l’organisme de recouvrement poursuive le paiement des sommes qui en font l’objet. »

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Article rédigé par La Team Capstan avocats

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