Actualité sociale du 22 juillet 2022
Action en indemnisation du harcèlement : le juge examiner les faits quelle que soit leur date
En matière de responsabilité civile, le point de départ du délai de prescription est le jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.
Pour se prononcer sur l’existence d’un harcèlement moral, il appartient au juge d’examiner l’ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d’apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l’existence d’un harcèlement moral. Dans l’affirmative, il revient au juge d’apprécier si l’employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
En l’espèce, le salarié se plaignait d’un épisode de harcèlement moral précisément circonscrit à l’année 2005 puis d’un second épisode allant de 2013 à 2016. Le juge du fond a décidé qu’en l’absence de répétition durant cinq ans, les faits de harcèlement de 2005 ont été atteints par la prescription avant que ne débute l’épisode de 2013-2016.
A tort selon la Cour de cassation : le salarié soutenant avoir été victime d’agissements de harcèlement moral jusqu’en 2016, il en résultait que, le salarié ayant saisi la juridiction prud’homale le 5 septembre 2016, son action en indemnisation du harcèlement moral n’était pas prescrite. Il appartenait dès lors au juge du fond d’analyser l’ensemble des faits invoqués par le salarié permettant de présumer l’existence d’un harcèlement moral, quelle que soit la date de leur commission.
Cass. soc., 29 juin 2022, n°21-13.959
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Procédure de précisions des motifs : faut-il en informer le salarié dans la lettre de licenciement ?
Depuis les ordonnances Macron du 22 septembre 2017, les motifs énoncés dans la lettre de licenciement peuvent, après la notification de celle-ci, être précisés par l’employeur, soit à son initiative soit à la demande du salarié.
Le salarié peut, dans les 15 jours suivant la notification du licenciement, demander à l’employeur des précisions sur les motifs énoncés dans la lettre de licenciement. L’employeur dispose d’un délai de 15 jours après la réception de la demande du salarié pour apporter des précisions s’il le souhaite.
Il communique ces précisions au salarié par lettre recommandée avec avis de réception ou remise contre récépissé. Dans un délai de 15 jours suivant la notification du licenciement et selon les mêmes formes, l’employeur peut, à son initiative, préciser les motifs du licenciement.
Surtout, l’article L. 1235-2 du Code du travail précise qu’ « à défaut pour le salarié d’avoir formé auprès de l’employeur une demande en application de l’alinéa premier, l’irrégularité que constitue une insuffisance de motivation de la lettre de licenciement ne prive pas, à elle seule, le licenciement de cause réelle et sérieuse et ouvre droit à une indemnité qui ne peut excéder un mois de salaire ».
Se posait donc la question de savoir si l’employeur, pour pouvoir échapper, en cas de contentieux, à une absence de cause réelle et sérieuse du licenciement du fait de l’insuffisance de motivation de la lettre de licenciement, devait au préalable avoir informé le salarié de son droit de demander des précisions sur les motifs de son licenciement.
Certaines entreprises ont, par prudence, pris le parti d’en faire la mention dans le courrier de licenciement (ce qui, en pratique, amène certains salariés à demander des précisions alors même que la lettre de licenciement est particulièrement motivée).
Les questions/réponses du Ministère du Travail apportaient déjà une première réponse, estimant qu’il ne s’agissait que d’une mention informative et non obligatoire dans la lettre de licenciement.
C’est en ce sens que la Cour de Cassation s’est prononcée le 29 juin dernier (n°20-22.220), puisqu’après avoir rappelé les dispositions des articles L.1235-2 et R. 1232-13 du Code du travail, elle conclut qu’ « aucune disposition n’impose à l’employeur d’informer le salarié de son droit de demander que les motifs de la lettre de licenciement soient précisés. »
Par conséquent, l’employeur n’a pas à préciser, dans la lettre de licenciement, la procédure de demande de précision des motifs du licenciement.
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Mesures COVID 19 : précisions sur la prise de jours de repos imposée
- la nécessité d’adapter son organisation face à une augmentation inattendue de l’absentéisme tenant au fait qu’une partie de ses salariés se trouvait à domicile sans possibilité de télétravailler ;
- la nécessité d’aménager les espaces de travail et d’adapter le taux d’occupation des locaux en raison des conditions sanitaires. Cette liste n’est pas exhaustive : d’autres conséquences de la crise sanitaire pourraient également être mis en avant en cas de litige sur la mobilisation de ces dispositifs (difficultés économiques, problèmes de trésorerie, restrictions d’ouverture et arrêt d’activité pour les activités « non essentielles », difficultés d’approvisionnement, désorganisation des chaines de production, etc.) ; la seule obligation pesant sur l’employeur étant de démontrer la réalité du retentissement de la crise sanitaire sur le fonctionnement de l’entreprise. Au-delà de cette démonstration, la Cour de cassation rappelle qu’il n’appartient pas au Juge de contrôler le choix de l’employeur de mettre en œuvre les mesures de l’ordonnance n°2020-473.
- le salarié est une personne vulnérable présentant un risque de développer une forme grave d’infection au virus SARS-CoV-2, selon des critères définis par voie réglementaire ;
- le salarié partage le même domicile qu’une personne vulnérable au sens du deuxième alinéa du présent I ;
- le salarié est parent d’un enfant de moins de 16 ans ou d’une personne en situation de handicap faisant l’objet d’une mesure d’isolement, d’éviction ou de maintien à domicile. Ces dispositions fixent un régime d’ouverture de l’activité partielle qui est fondé sur la situation personnelle de certains salariés, et distinct de celui ouvert par le code du travail au regard de la situation de l’entreprise. Par l’arrêt du 6 juillet 2022, la Cour de cassation apporte deux précisions. D’une part, l’employeur n’est pas tenu de recourir à l’activité partielle pour les salariés relevant des situations visées dans la loi de finances rectificative ; l’employeur garde la possibilité, comme cela a été fait en l’espèce, de maintenir la rémunération des salariés. Néanmoins, l’employeur ne peut pas appliquer à ces salariés les dispositions des articles 2 à 4 de l’ordonnance n°2020-323 du 25 mars 2020. La Cour de cassation indique dans sa note explicative que ces dernières mesures visent à répondre à la situation concrète de l’entreprise et ne sauraient être mobilisées en raison de la situation personnelle de certains salariés dans l’impossibilité de travailler. Si les mesures prévues par les articles 2 et 4 de l’ordonnance n°2020-323 ont cessé de s’appliquer après le 30 septembre 2021, cet arrêt a le mérite d’apporter des éclairages nécessaires dans le cadre de contentieux en cours ou à venir sur la légitimité du recours à ces dispositifs.