Les critères d’ordre de licenciement économique : Synthèse des dernières décisions rendues par le Conseil d’État
Critères d’Ordre dans le Licenciement Économique : Mode d’Emploi
Les critères d’ordre, à quoi servent-ils et quelles sont les règles à respecter ?
Lorsqu’un employeur envisage de procéder à un licenciement économique collectif, il doit impérativement en informer le ou les salariés potentiellement licenciés.
Afin d’être le plus objectif possible, et notamment afin d’éviter toute décision arbitraire, l’employeur doit pour cela fixer des critères d’ordre des licenciements, qui lui permettront d’identifier les salariés qui seront concernés par le licenciement économique.
L’article L. 1233-5 du Code du travail précise que « Lorsque l’employeur procède à un licenciement collectif pour motif économique et en l’absence de convention ou accord collectif de travail applicable, il définit les critères retenus pour fixer l’ordre des licenciements, après consultation du comité social et économique. »
Ces critères prennent notamment en compte :
- Les charges de famille, en particulier celles des parents isolés ;
- L’ancienneté de service dans l’établissement ou l’entreprise ;
- La situation des salariés qui présentent des caractéristiques sociales rendant leur réinsertion professionnelle particulièrement difficile, notamment celle des personnes handicapées et des salariés âgés ;
- Les qualités professionnelles appréciées par catégorie. L’employeur peut privilégier un de ces critères, à condition de tenir compte de l’ensemble des autres critères prévus au présent article (…) ».
De quelle manière l’employeur doit-il s’y prendre pour déterminer les critères d’ordre des licenciements, lorsqu’il met en place un plan de sauvegarde via un document unilatéral ? De quelle manière le contrôle des critères d’ordre doit-il être opéré par l’administration ?
Rôle de l’Administration dans le Contrôle des Critères de Licenciement
Dans un arrêt en date du 31 octobre 2023, le Conseil d’État précise qu’il appartient à l’administration, lorsqu’elle est saisie d’une demande d’homologation d’un document unilatéral portant plan de sauvegarde de l’emploi, de s’assurer, en l’absence d’accord collectif ayant fixé les critères d’ordre des licenciements, que le document unilatéral recourt aux quatre critères mentionnés par le Code du travail.
À cet égard, tel n’est pas le cas s’il prévoit, pour un ou plusieurs des critères d’ordre légaux, d’affecter la même valeur pour tous les salariés, empêchant ainsi par avance que ce ou ces critères puissent être effectivement pris en compte au stade de la détermination de l’ordre des licenciements.
Le Conseil d’État ajoute que, il incombe à l’administration de contrôler que les éléments, déterminés par l’employeur, sur la base desquels ces critères seront mis en œuvre pour déterminer l’ordre des licenciements, ne sont ni discriminatoires, ni dépourvus de rapport avec l’objet même de ces critères. L’administration prend en compte à cet effet l’ensemble des éléments qui lui sont soumis, notamment les échanges avec les représentants du personnel au cours de la procédure d’information et de consultation préalable à l’adoption du document unilatéral portant plan de sauvegarde de l’emploi, ainsi que les justifications objectives et vérifiables fournies par l’employeur.
À ce titre, s’agissant du critère d’ordre relatif aux qualités professionnelles, dont les éléments d’appréciation, à la différence de ceux des autres critères d’ordre, peuvent différer selon les catégories professionnelles définies par le plan de sauvegarde de l’emploi, il appartient en particulier à l’administration de vérifier que les éléments d’appréciation de ce critère, retenus par l’employeur, ne sont pas insusceptibles de permettre de prendre en compte les qualités professionnelles des salariés de la ou des catégories professionnelles afférentes et n’ont pas été définis dans le but de permettre le licenciement de certains salariés pour un motif inhérent à leur personne ou à leur affectation sur un emploi ou dans un service dont la suppression est recherchée. A cet égard, les résultats de l’évaluation professionnelle des salariés, lorsqu’ils existent, peuvent être utilement retenus par l’employeur.
CE, 31 octobre 2023, n°456091
Analyse des Décisions du Conseil d’État sur le Licenciement Économique
Dans un second arrêt daté du même jour, le Conseil d’état a été amené à se prononcer cette fois sur le périmètre d’application des critères d’ordre arrêté par le plan de sauvegarde d’emploi.
Il convient de retenir en substance que, lorsqu’elle est saisie par un employeur d’une demande d’homologation d’un document unilatéral portant plan de sauvegarde de l’emploi, il appartient à l’administration de vérifier que le périmètre d’application des critères d’ordre des licenciements qui y a été retenu est conforme aux dispositions légales et conventionnelles applicables.
Lorsque le juge administratif est saisi d’une demande tendant à l’annulation d’une décision homologuant un tel document, il doit faire porter son contrôle sur le périmètre d’application des critères d’ordre arrêté par ce document, et non sur le périmètre utilisé par l’employeur lors de la mise en œuvre du plan de sauvegarde de l’emploi.
CE, 31 octobre 2023, n°456332