Webinar: La réforme des retraites et les RH
Géraldine Rathery, directrice marketing de la société QuickMS est aujourd’hui accompagnée de Julie Jacotot, avocate au sein du cabinet Capstan et specialisée dans la protection sociale, ainsi que de Céline Delile, spécialisée en assurance chez Delta Assurance. Céline et Julie nous racontent comment la réforme des retraites impacte le monde des RH.
Replay du webinar sur la réforme des retraites et les RH
Retranscription du webinar sur la réforme des retraites et les RH du 31 mai 2023
Géraldine
Bonjour à tous et bienvenu pour ce webinar sur le sujet passionnant de la réforme des retraites et de son impact sur les RH. Pour parler de ce sujet passionnant, nous recevons aujourd’hui Julie Jacotot qui est avocate associée au cabinet Capstan, et Céline Delile qui est directrice adjointe assurance de personnes chez Delta Assurance.
Petite introduction sur QuickMS, nous sommes un éditeur de logiciel RH qui a pour mission d’être le meilleur assistant RH que vous n’ayez jamais connu. On a deux logiciels, un logiciel intitulé GraphiQ qui fait du reporting RH et notamment qui automatise la BDESE, et un autre logiciel, Qrew, qui automatise les campagnes d’entretien et digitalise les entretiens des collaborateurs. Julie, Céline, je vous laisse vous présenter.
Julie
Bonjour je m’appelle Julie Jacotot et suis avocate associée au sein du cabinet Capstan, qui a une spécialisation dans le droit social. Et j’ai la chance d’être plus particulièrement spécialisée sur tous les sujets de protection sociale, de rémunération et notamment de retraite dont nous allons parler tout de suite.
Céline
Bonjour à toutes et à tous. Je suis Céline Delile. Comme l’a dit Géraldine, je suis spécialisée en assurance de personnes au sein de Delta Assurance, qui est un cabinet de conseils et de courtage dédié à l’accompagnement des entreprises sur les programmes d’assurance et, entre autres, sur les programmes d’assurance de personnes donc la protection sociale au sens large : santé, prévoyance et retraite qui est le sujet qui nous occupe aujourd’hui.
Julie Jacotot vous présentera tout le contexte général de la loi et j’interviendrai après sur une autre réforme qui date de 2019, c’est la réforme de la retraite par capitalisation, dite le PERO.
Géraldine
C’est bon, je pense qu’on peut y aller.
Julie
Merci beaucoup. Alors il ne vous aura pas échappé que ces derniers mois ont été monopolisés en termes d’actualité par la fameuse réforme des retraites dont on a beaucoup parlé, même si finalement, on va le voir, ce n’est pas une refonte de notre système de retraite.
Vous savez qu’en France, on a trois niveaux de retraite potentiels. On a le premier niveau qui est la retraite de base et qui a fait l’objet justement de la réforme Bornes-Macron dont on va parler. Le deuxième niveau de retraite, qui est un niveau de retraite complémentaire obligatoire, celui du régime Agirc-Arrco. Et puis, le fameux niveau 3 que j’évoquais à l’instant, le niveau des retraites supplémentaires que l’on peut mettre en place dans les entreprises, dont on peut aussi d’ailleurs bénéficier individuellement si on n’est pas salarié dans une entreprise.
Il est vrai que, le projet d’Emmanuel Macron était un projet assez ambitieux qui consistait à fusionner les deux premiers niveaux de la retraite, donc la retraite de base et la retraite complémentaire obligatoire, pour en faire un nouveau régime de retraite universel qui garantirait un euro cotisé, un euro de droit à la retraite. Mais ce projet était beaucoup trop ambitieux, puisqu’il impliquait de mélanger le monde du secteur privé, du secteur public et du secteur des indépendants, de toute façon, le covid étant intervenu, Emmanuel Macron a dû laisser tomber cette réforme. Et comme c’était un projet, on va dire de campagne, il s’est rabattu sur un projet un petit peu moins ambitieux, qui consiste à modifier simplement des paramètres de calcul, notamment de la formule de calcul de la retraite de base.
Alors bien sûr, on en a beaucoup entendu parler, et notamment ce qui a cristallisé les échanges, c’est le report de l’âge légal pour partir à la retraite entre 62 et 64 ans. Toutefois, on verra que ce reportage n’est pas la mesure qui concerne la majorité. Ce qui va vraiment concerner tout le monde en France, ça va être surtout l’allongement de la durée de cotisation et des trimestres qu’il faut cotiser pour avoir droit à une retraite de base.
Juste quelques chiffres pour qu’on comprenne un petit peu l’enjeu de cette réforme. Aujourd’hui on fonctionne par répartition, donc c’est un système où, quand on cotise sur son bulletin de paie les cotisations de retraite ne sont pas des droits qui sont mis de côté pour nous et qui pourront nous servir de pension de retraite plus tard. Ça, c’est le système par capitalisation, que Céline décrira après. Là, nous sommes dans un système de répartition, c’est-à-dire que ce sont les actifs qui financent le régime des retraités. Pourquoi a-t-on un besoin de réformer ? Parce qu’on a de moins en moins d’actifs par rapport au nombre de retraités. Donc, il est prévu 1,4 cotisants pour un retraité d’ici 2050, là où on avait 3 cotisants pour un retraité en 1970. Donc, on voit très bien le besoin de financement du dispositif.
Plus haut j’ai mentionné un âge de départ à la retraite, il y a en effet un âge dans les textes mais il y a aussi un âge qu’on constate dans les faits. L’âge moyen est déjà supérieur à l’âge qui était fixé dans la loi de 62 ans puisque celui-ci il est déjà de 62,6 ans, avec une petite disparité entre les hommes et les femmes puisque les femmes partent un petit peu plus tard. En tout cas, l’âge de 62 ans a déjà été dépassé même si il y a des disparités en fonction des professions. Par exemple, pour les ouvriers employés c’est un tout petit peu en dessous de 62 ans, mais pour les cadres on dépasse largement les 62 ans puisqu’on est un peu plus sur 63 ans. Et pour les professions libérales, on est plutôt sur 65 ans.
Le taux d’emploi des seniors est assez faible en France, puisqu’il y a seulement 33% des personnes entre 60 et 64 ans qui sont sous emploi, alors qu’on a un niveau moyen de 45% dans l’Union Européenne. Donc cette partie était pour vous poser les termes des problématiques et des âges tels qu’on les constate.
Sachant que, comme vous pouvez le voir, l’âge de 62 ans, qui est l’âge actuel de départ à la retraite, est déjà, dans les faits, quand même relativement dépassé. Autre petit rappel qui va vous permettre de comprendre finalement le contenu de cette réforme, qui n’est pas si révolutionnaire que cela mais qui va venir modifier certains paramètres de la formule de calcul qui existe aujourd’hui.
Pour calculer sa retraite de base, indépendamment du fait d’avoir atteint un certain âge qui était de 62 ans jusqu’à présent, il y a une formule de calcul qui va s’appliquer et qui va prendre en compte plusieurs paramètres.
Le premier paramètre, c’est le salaire annuel moyen qui est retenu sur les 25 meilleures années de sa carrière. Donc, c’est quand même une période assez étalée. Mais ce salaire annuel moyen, il sera, de toute façon, à chaque fois plafonné par le montant du plafond de la sécurité sociale qui est retenu cette année-là, à chacune des 25 meilleures années. Donc si je prends l’exemple de l’année 2023, puisque nous sommes en 2023, le montant du plafond mensuel de la sécurité sociale est de 3666 euros. Donc, c’est un montant assez « faible » puisque ça va plafonner toutes les rémunérations des 25 meilleures années. A ce salaire moyen on va appliquer un taux, qui est le fameux taux plein dont on parle très souvent quand on parle de retraite ainsi que le taux maximal, justement il est de 50%. Donc en tout et pour tout la retraite de base ne peut nous donner que 50% du salaire annuel moyen, qui lui-même aura été plafonné au regard du plafond de la sécurité sociale.
Donc, si je prends un exemple basique pour les besoins des chiffres : imaginons que le salaire annuel moyen, on va par simplicité retenir le montant du plafond de la sécurité sociale de cette année 2023 est de 3 666 euros. Ça veut dire qu’au max du max, du max, j’aurai le droit à 50% de ces 3 666 euros. Donc au maximum, la retraite de base me générera 1 800 euros de retraite avec une carrière pleine.
Donc, vous voyez que la différence entre 1200 euros qui est le plancher de la retraite et 1800 euros n’est pas énorme. Alors bien sûr, 600 euros en valeur absolue, c’est très important, mais c’est pour tous les salariés en France qui auraient des carrières complètes. On voit que, finalement, la différence, n’est pas énorme et que l’État ne va pas pouvoir nous donner énormément de choses.
Cette petite multiplication du salaire annuel moyen, auquel on applique ce taux de 50%, est aussi potentiellement impacté par la durée de cotisation, c’est-à-dire les trimestres qui sont requis par la réglementation pour avoir le droit à une pension pleine. Et si cette pension n’est pas pleine ma durée de cotisation n’est pas pleine non plus. Déjà, le taux, il ne sera plus de 50%, il sera ce qu’on appelle impacté par une décote, mais aussi il y aura un coefficient de proratisation qui viendra me diminuer le montant ainsi calculé.
Sans rentrer plus dans le détail, c’est surtout pour vous rappeler la complexité, la façon dont on calcule la retraite en France et les différents paramètres qui entrent en jeu. Et c’est aussi important de se le rappeler, puisque comme je vous l’indiquais en introduction, finalement, la réforme « Borne-Macron » qui a été adoptée en avril dernier ne vient que modifier des paramètres existants. Elle ne modifie en rien la formule de calcul et la façon dont le système fonctionne depuis maintenant des années. Si on rentrait plus dans le vif du sujet sur en quoi consiste exactement cette réforme ?
Le premier point, c’est l’augmentation de l’âge légal, qui va donc passer progressivement de 62 ans à 64 ans. C’est une augmentation progressive, c’est-à-dire que chaque génération à partir des personnes nées sur la fin de l’année 1961, vont prendre trois mois par génération. Les premières générations qui seront concernées lorsqu’elles partiront à la retraite à cet âge de 64 ans ce seront les salariés nés en 1968. Donc c’est le premier point dont on a énormément parlé puisque ça a cristallisé les débats dans le sens où le gouvernement tenait absolument à cet âge et à l’inverse, les partenaires sociaux disaient : « Moi, je ne discute pas si les 64 ans restent dans le projet ». Mais, comme c’était un totem pour le gouvernement, ces 64 ans sont restés. Donc, il n’y a finalement eu aucune négociation dans ce projet.
Le souci, c’est que, comme je vous le disais, il n’y a pas que l’âge qui compte. Il y a également la durée de cotisation qui est exigée pour avoir le droit de calculer cette pension. Et c’est là où c’est le deuxième aspect de la réforme. Il y avait une réforme qui avait été opérée en 2014 qu’on appelle la réforme Touraine, qui avait allongé justement la durée de cotisation pour la passer progressivement à 172 trimestres, ce qui correspond approximativement à 43 années de cotisations. Donc, cet allongement de la durée était déjà dans une réforme qui a maintenant presque 10 ans. Et ce qu’a fait la réforme « Borne-Macron », c’est qu’elle a accéléré le calendrier au terme duquel on parvient à ces 43 années de cotisation. Donc, au lieu d’y parvenir en 2035, on va y accéder maintenant en 2037. C’est important de se le dire parce que si vous additionnez, je prends un exemple concret de quelqu’un qui aurait fait un petit peu d’études et qui rentrerait sur le marché du travail à 21 ans. De toute façon, si vous additionnez 21 à 43, donc les fameuses 43 années de cotisation, vous parvenez naturellement à l’âge de 64 ans. Et si j’atteins mes 172 trimestres avant 64 ans, normalement je ne peux pas liquider. Le seul intérêt d’avoir une durée de cotisation plus élevée, c’est que j’aurais potentiellement, ce qu’on appelle, une surcote, donc un montant de pension qui sera un petit peu plus élevé.
Pourquoi insister sur la durée de cotisation ? Parce que finalement c’est vraiment ça qui va déterminer, en pratique, l’âge auquel on va pouvoir partir à la retraite. Et c’est d’ailleurs la raison pour laquelle, à titre personnel, je m’étais dit que finalement, en accélérant le calendrier pour parvenir aux 43 années de cotisation, le gouvernement aurait presque pu se passer de l’âge de 64 ans, puisque de toute façon, un certain nombre de Français y seraient parvenus naturellement. Après, bien sûr, ça ne concerne pas tout le monde. Et finalement, les personnes qui vont être impactées, à la fois par la durée de cotisation et à la fois par l’âge, ce sont des personnes qui auront commencé à travailler tôt, qui ne seront pas éligibles au dispositif de départ anticipé, et qui, même en cotisant 43 années, n’auront pas atteint l’âge cible de 64 ans. Et c’est pour ces personnes-là finalement qu’on peut dire que la réforme a était injuste, puisqu’il n’y a pas eu de période transitoire, comme on a, par exemple, sur les régimes spéciaux.
Les principaux régimes spéciaux en France ont été fermés par l’effet de la réforme Borne-Macron, mais avec ce qu’on appelle l’insertion d’une clause du grand-père qui permet de n’appliquer la réforme qu’aux personnes qui seront embauchées à compter de septembre 2023, qui est la date d’entrée en vigueur de la réforme Borne-Macron. Pourtant pour les salariés du privé il n’y a pas de SAS de sécurité avant d’être directement concerné par les mesures. Et c’est ce qui fait que beaucoup ont dit que la réforme était injuste. Si on devait schématiser la réforme on dirait qu’elle n’a aucun impact pour les cadres qui, de toute façon, se voyaient déjà appliquer cette durée de 43 ans de cotisations. Et ceux qui ont commencé à travailler un peu plus tard et qui sont rentrés un peu plus tard sur le marché du travail si on fait : âge d’entrée sur le marché du travail + 43 ans, on va très naturellement aller déjà aux 64 ans. Donc vous avez vu les statistiques que je vous ai données, il se trouve que l’ on était déjà à plus de 63 ans sans avoir réformé l’âge. Donc, on va y parvenir de toute façon très naturellement pour les cadres. En revanche, pour les non-cadres et pour des personnes qui ont travaillé plus tôt et qui seraient amenées à travailler plus de 43 ans, ils vont être impactées à la fois par l’âge et à la fois par la durée de cotisation. Donc, une fois qu’on a compris ça, on a compris la réforme puisque c’était vraiment ça les points essentiels s’agissant des mesures techniques qui ont été mises en œuvre par le dispositif. Ensuite il y a un point qui ne change pas : c’est l’âge auquel j’ai droit à une pension à taux plein. Le taux plein je vous rappelle c’est l’âge auquel on va l’appliquer, quel que soit ma carrière, un taux de 50%. C’est-à-dire que même si je n’ai pas suffisamment cotisé, je n’aurai pas de décote sur ce taux de 50%. Attention quand même, j’attire votre attention, parce que bien évidemment, les politiques, quand ils en ont parlé, ils se sont bien cachés d’insister là-dessus, les 67 ans quand j’atteins cet âge-là, j’ai, en effet, le taux de 50% qui m’est garanti dans la formule de calcul.
Géraldine
Je lis juste une question très pratico-pratique d’un participant : « si on atteint ses 172 trimestres avant les 64 ans comment fait-on ? »
Julie
C’est ce que je disais à l’instant. Si on ne peut pas partir de façon anticipée, parce qu’il y a en effet des cas qui sont quand même prévus par la réglementation je vais y venir juste après, où on aura le droit de partir avant 64 ans. Il est vrai que même si je cotise plus, même si j’ai déjà atteint mes 172 trimestres, c’est-à-dire, mais 43 années de cotisation, je devrais quand même attendre les 64 ans pour pouvoir liquider. Et c’est là où la réforme, en effet, est injuste, puisque ça va concerner essentiellement des gens qui auront travaillé tôt, qui ne pourront pas bénéficier d’un dispositif de départ anticipé, parce qu’il y a quand même pas mal de conditions à remplir pour y parvenir, et qui, parce qu’ils devront finalement attendre 64 ans, cotiseront plus que 172 trimestres.
Cela étant, il y a plein de dispositions sur lesquelles je ne reviendrai pas. Des dispositions notamment qui permettent le rachat de trimestre pour valider ses années d’études. Le problème, c’est que le rachat trimestre est très cher, donc là ils ont essayé d’identifier des hypothèses où ça le serait un peu moins.
Il y a bien sûr tous ces systèmes-là qui ne sont absolument pas changés par la réforme Borne-Macron. Il existe toujours des systèmes d’équivalence, c’est-à-dire que quand je parle de durée de cotisation, c’est effectivement cotisé parce que j’ai travaillé ou par équivalence. Et ça, la réforme Borne-Macron ne change rien. La seule chose sur laquelle il y a, on va dire, des petites choses qui ont été modifiées, c’est pour essayer de privilégier la retraite des femmes et justement faire en sorte que les femmes soient moins pénalisées, puisque on sait très bien que même s’il y a des équivalences, quand on a des enfants, on a des validations de trimestres en contrepartie, on peut avoir des carrières qui sont un petit peu plus hachées, et donc finalement des « pertes » de trimestres sur toute sa carrière. Et il y a notamment un mécanisme de majoration du montant de la pension pour les femmes qui ont eu des majorations de trimestres pour enfants et qui auront finalement déjà atteint toutes les conditions avant d’atteindre l’âge légal de départ à la retraite. Donc finalement, la réforme n’a absolument pas chamboulé la façon dont ça fonctionne actuellement
Si on poursuit, j’en arrive aux cas des départs anticipés. Alors selon le gouvernement il y aurait quatre personnes sur 10 qui pourraient bénéficier d’un dispositif de départ anticipé c’est à dire un dispositif qui me permettrait de partir avant 64 ans à la retraite. Donc ce n’est quand même pas rien 4 salariés sur 10, il y a donc des dispositifs qu’on connaissait déjà : le dispositif des carrières longues, qui est celui qui a beaucoup fait parler. Il nous faudrait une matinée entière pour finalement décortiquer le dispositif des carrières longues. Mais ce qu’il faut retenir, c’est qu’il y a des bornes à partir desquelles, quand on aura commencé à travailler, si j’ai un certain nombre de trimestres requis cette première année de travail, je vais pouvoir partir de façon anticipée.
Donc, si j’ai commencé à 16 ans, 18 ans, 20 ans, 21, sachant que le 21 a été rajouté justement par la réforme. Donc c’est vraiment ce système qui permet, parce qu’on aura commencé à travailler plus tôt, à prétendre à un âge de départ plus tôt. Et c’est pareil, ça dépend de l’année de naissance, de l’âge auquel on a commencé à travailler, du nombre de trimestres qu’on aura totalisés cette année-là. Donc, c’est la raison pour laquelle on ne peut pas faire de généralités. En tout cas, sachez que c’est un descriptif qui est très important, parce qu’en effet, c’est celui finalement qui est le plus utilisé par les salariés qui partent de façon anticipée, mais qui a quand même des conditions à respecter. Et c’est pour ça que je vous disais que certaines personnes, même si elles ont commencé à travailler tôt ne pourront pas forcément y prétendre. Et c’est ce qui fait qu’elles pourront être amenées à travailler avant d’avoir atteint les 43 années de cotisation, mais si elles n’ont pas encore atteint les 64 ans elles ne pourrons pas forcément liquider leur retraite.
Il y a aussi la situation de handicap et la situation d’incapacité permanente qui résultent d’un cas d’accidents du travail, de maladie professionnelle. Donc ce qu’il faut retenir, c’est que ces cas-là existaient déjà et ils existent toujours. Ce qu’a fait la réforme, c’est simplement les adapter au regard de l’allongement de la durée de cotisation et de la durée de carrière. Mais on reste sur des dispositions qu’on connaissait déjà. Cependant, il y a un nouveau cas qui existe qui a été intégré, c’est celui de la retraite pour inaptitude au travail, donc pas forcément suite à une situation d’accident du travail ou maladie professionnelle. Et on va notamment trouver le cas des salariés en invalidité qui sont normalement automatiquement reconnus inaptes au travail. Mais au moment où on atteint l’âge légal de départ, donc aujourd’hui, les invalides basculent automatiquement à la retraite à l’âge de 62 ans. Si on avait appliqué la réforme telle qu’elle jusqu’au bout normalement, les invalides auraient basculé deux ans plus tard, c’est-à-dire à 64 ans en invalidité à la retraite. Ce qu’a fait la réforme, c’est qu’ils ont voulu figer dans le temps cet âge de 62 ans pour ces personnes-là. Donc ça devient un nouveau cas de départ anticipé. Ce qu’il faut retenir, c’est que sur toutes ces mesures-là, on va avoir une flopée de décrets et d’arrêtés. La ministre nous en a annoncé une trentaine. Du coup, espérez que, un peu comme il y avait eu le CPE à l’époque, le gouvernement adopte sa loi, la publie, mais qu’on ne prenne pas les décrets d’application, finalement ça rendrait inapplicable la réforme. Mais ce n’est pas du tout ce qui va se passer. Le gouvernement est vraiment déterminé à aller jusqu’au bout de sa réforme. Nous avons déjà vu passer certains projets de décret, et notamment certains qui parlaient des carrières longues ou de la retraite pour inaptitude. Alors c’était important de se rappeler quand même ces dispositions techniques, puisque c’est ce qui vous permet quand même de réaliser que cette réforme a moins d’ampleur que ce qu’on avait pu le comprendre, même parfois quand on voit finalement l’incompréhension et l’insatisfaction qu’elle a manifestée. Et comme finalement la réforme a été beaucoup moins ambitieuse que ce que le gouvernement souhaitait.
Donc, sur les impacts RH, je voulais juste vous parler d’une chose qui est assez importante. Alors certes, elle a été censurée par le Conseil constitutionnel, mais elle va forcément revenir dans une prochaine loi. C’est en effet tout l’aspect emploi des seniors qui était vraiment un aspect de la loi. Quand vous preniez la loi, c’est beaucoup de petits articles qui sont modifiés, sur un mot, un paragraphe. Mais ce qui était quand même assez intéressant, quand on prenait la peine de regarder cette loi, c’est qu’il y avait vraiment l’aspect mesures techniques que je viens de vous décrire, et aussi tout un volet mesures RH.
C’est important de savoir qu’il y avait beaucoup d’éléments sur l’emploi des seniors, pour inciter les entreprises à employer encore plus de seniors et surtout à les accompagner le plus progressivement possible vers la retraite. Puisqu’il y a quand même quelque chose qui est assez traumatisant pour les seniors, c’est de travailler à temps plein jusqu’à la retraite et tout d’un coup, le jour où je liquide et je quitte l’entreprise, je m’arrête d’un coup de travailler.
Donc, il n’y a pas assez de progressivité pour les personnes qui partent à la retraite aujourd’hui en France, et c’était vraiment un volet important de cette loi. Malheureusement, ce sont les seules mesures qui ont été censurées par le Conseil constitutionnel. Pourquoi alors ? Parce que le gouvernement, comme il avait choisi comme vecteur de sa réforme un projet de loi de financement de la sécurité sociale, on était sur des mesures normalement purement techniques, des mesures de budget, d’économie. Et finalement, les mesures RH deviennent souvent des cavaliers sociaux. C’est la raison pour laquelle ils ont été censurés.
En termes de chronologie, on aurait pu se dire qu’il eut était opportun de commencer par la loi sur l’emploi avant la loi sur la retraite. En tout cas, dans la loi et dans ce qu’on va retrouver plus tard, il y avait un vrai objectif qui aurait été inscrit dans le Code du travail de prise en compte générale des seniors et d’amélioration de l’embauche et de maintien en activité des salariés expérimentés, seniors ou âgés. Cela étant, on retient la formulation qu’on veut, il y en a qui sont quand même plus opportunes que d’autres et plus valorisantes que d’autres. Donc, il y avait ce principe général de prise en compte, avec aussi quelque chose dont vous avez forcément entendu parler, c’est l’index des seniors, un peu comparable à ce que vous connaissez déjà dans les entreprises : l’index égalité homme-femme. L’idée, c’est d’inciter les entreprises à recruter plus de salariés seniors et même à prendre des dispositions pour garantir le maintien dans l’emploi. Donc, ça devait s’appliquer dès la fin de l’année pour les entreprises d’au moins 300 salariés. Il y avait tout de même un seuil entre les 300 et 1000, et les plus de 1000. Cet élément a été censuré, parce que considéré comme un cavalier législatif. Mais sachez que vous allez bientôt le voir revenir. Et pourquoi je vous en parle ? Parce qu’ à chaque fois qu’il y a un index il y a une pénalité qui va avec, c’est-à-dire un pourcentage de la masse salariale qui doit être acquitté quand on ne respecte pas les obligations. Ici il y avait plus ou moins un process qui était prévu, avec un certain nombre d’années au cours desquelles je pouvais encore me justifier. Mais ça vous le verrez très prochainement. C’était pour vous dire que ce point-là n’allait pas être oublié, tout comme une obligation de négocier sur l’emploi des seniors dans le cadre de la GPP. Donc ça aussi, c’est quelque chose qui avait été rajouté par la loi et qui a été censuré, mais que vous retrouverez aussi prochainement.
Alors, dernier point censuré, c’est aussi le CDI de fin de carrière, le CDI de fin de carrière l’objectif était de dire « Je vais inciter ». L’idée c’était de permettre aux entreprises qui embauchent des seniors en CDI d’avoir des exonérations de cotisations de sécurité sociale en contrepartie. Bon, malheureusement, le CDI de fin de carrière, il avait été largement grignoté, parce que très coûteux. L’exonération était quand même relativement mesurée, et surtout, on pouvait embaucher en CDI de fin de carrière seulement des personnes qui étaient déjà au chômage de plus ou moins de longue durée. Donc, il y avait quand même un spectre qui n’était pas très élargi. À voir comment, justement, ce dispositif va être repris en main par les partenaires sociaux et le gouvernement, qui sont censés rediscuter sur ces sujets. Point qui n’a pas été censuré, parce que par conséquent il y avait un vrai aspect technique et de budget, c’est la modification du traitement social des ruptures conventionnelles. Puisque jusqu’à présent, il y avait un régime différent selon que la personne était en âge ou pas de prétendre à une pension de vieillesse, et il y avait un forfait social de 20% qui s’appliquait sur la fraction de l’indemnité qu’on pouvait verser qui était exonérée de cotisations de sécurité sociale. Au 1er septembre 2023, ça change. Il y a une unification du régime d’exonération dans la limite des deux plafonds de Sécurité sociale qu’on connaît. Ça, il n’y a rien qui change, mais c’est juste qu’on ne fait plus de distinction, et par contre, on appliquera une nouvelle contribution de 30% sur la fraction exonérée de cotisation. Donc évidemment, on passe de 20% à 30%, on prend 10 points. Donc ça fait 10 points supplémentaires pour le gouvernement, ce qui n’est pas négligeable. C’est censé être dissuasif, moi je ne pense pas que ça dissuadera les entreprises de ruptures conventionnelles, y compris avec des seniors, mais en tout cas, le régime social est maintenant un petit peu plus pénalisant.
Donc les deux derniers points que je voulais évoquer avec vous, là on rentre vraiment dans le sujet de l’accompagnement des seniors, les accompagner une transition vers la retraite. C’est que comme je vous le disais tout à l’heure, ça peut paraître assez brutal pour une personne de s’arrêter du jour au lendemain quand elle a travaillé 43 ans de sa vie, voire plus, et donc non, il n’y a pas de décret pour les 30% de la nouvelle contribution qui va concerner les indemnités pour rupture conventionnelle. Alors, il y aura peut-être des décrets qui viendront en reparler, mais en tout cas, la loi normalement se suffit à elle-même sur ce point-là. Donc ça s’appliquera vraiment aux ruptures intervenues à partir du 1er septembre 2023.
Il y a quelque chose qui existe depuis très longtemps dans les textes, c’est vraiment un dispositif de pure sécurité sociale qui permet aux salariés qui sont proches de la retraite de mettre en œuvre ce qu’on appelle un dispositif de retraite progressif. C’est-à-dire que ça permet, deux ans avant l’âge cible de départ de solliciter une sorte de pré-liquidation de sa pension de retraite. Donc deux ans avant de partir la sécurité sociale pendant ces deux années va nous verser déjà une partie de notre pension, mais qui ne sera que pré-liquidée, ce n’est pas une liquidation définitive. Et ça permet de rester à temps partiel dans l’entreprise et donc d’avoir un salaire à temps partiel. Pourquoi c’est bien pour les entreprises ? C’est que tout simplement ça permet aussi de diminuer la masse salariale. On sait aussi très bien, on va être honnête, que c’est un frein à l’emploi des seniors, ce sont justement les salaires qui sont plus élevés et la masse salariale très importante qui peut être attachée à ces salariés. Donc ce dispositif est un bon moyen finalement de faire continuer le salarié à travailler en réduisant progressivement la voilure jusqu’à son départ définitif à la retraite. Et donc on peut faire ça deux ans avant l’âge légal de départ.
Ce n’était pas très utilisé parce que jusqu’à présent, on ne pouvait pas l’appliquer à des salariés en forfait jour, et la loi a été modifiée en 2022 pour le permettre. Donc, c’est quelque chose qui a vraiment vocation à se développer, et surtout, ce qu’a fait la réforme Borne-Macron, c’est de faire en sorte que la retraite progressive, l’utilisation de ce dispositif devienne un droit par principe pour le salarié, au sens que l’employeur ne pourra pas s’y opposer, sauf un motif très particulier, notamment si la durée de temps partiel souhaitée par le salarié est incompatible avec l’activité économique de l’entreprise, et notamment l’activité exercée par le salarié. Mais donc, ça, c’est vraiment un truc super dans les entreprises dont on devrait avoir beaucoup plus connaissance, parce que ça permet vraiment, tout en maintenant les seniors dans l’emploi, de réduire progressivement leur activité et aussi la masse salariale qui en découle. Et l’avantage, c’est que quand je suis en retraite progressive, cette période de deux années ne va pas me causer préjudice quand je vais liquider ma pension définitivement deux ans après. Ces deux années-là, elles comptent à part entière et je ne vais pas être pénalisé si je vais utiliser ce dispositif-là. On va me calculer sur une base temps plein pour ce système. Donc, c’est pour ça qu’il est génial ce dispositif. Mais quand je fais des sondages, quand on a la chance de pouvoir être en présentiel parfois avec certaines personnes et de faire lever les mains aux gens, c’est vrai que finalement, j’ai très peu de personnes qui connaissent le dispositif ou qui l’utilisent. Pour celles qui l’utilisent, c’est souvent couplé avec des dispositifs, par exemple, de fin de carrière qu’on va mettre dans l’entreprise et où on va accompagner les salariés, parce que ça reste quand même une démarche personnelle. Donc, ça, c’est quelque chose vraiment qui mérite d’être connu et qui est encore plus facilité par la réforme Borne-Macron, et qui est tellement facilité que, comme ça devient un droit pour le salarié, il faut vraiment que ce soit connu des DRH des entreprises, parce que si vous ne connaissez pas ce dispositif-là vous n’êtes pas à l’abri d’avoir un salarié qui demain vient toquer à votre porte pour vous demander de mettre en œuvre ce dispositif.
Un dernier point qui est le cumul emploi-retraite. Je vous rappelle juste que ça permet la retraite progressive : c’est quand je ne suis pas encore définitivement parti à la retraite et je réduis un peu la voilure, mais mais également quand je liquide ma retraite et que je veux continuer à travailler dans l’entreprise. Dans ces cas-là, le dispositif de cumulant pour la retraite existe en France depuis un certain nombre d’années. Il est même libéralisé depuis un certain temps pour favoriser justement la reprise des emplois. Il y avait juste une petite inégalité ou incohérence dans le dispositif, c’est que quand vous êtes en cumul emploi-retraite, comme vous avez déjà liquidé votre retraite, toutes les cotisations de retraite que vous pouvez payer sur votre bulletin de paie, en tant que cumulât ne vous servent pas à vous par définition, puisque de toute façon, on est dans un système de répartition, mais c’est vrai qu’elles sont « cotisées à perte », puisque comme vous avez déjà liquidé votre retraite. Donc finalement les cotisations que vous allez payer ne vous donnent pas de droits supplémentaires. Le principal apport de la réforme Borne-Macron, c’est de permettre justement qu’un salarié en cumul emploi retraite, quand il va cotiser de nouveau sur un nouveau salaire de reprise d’activité, puisse se constituer une deuxième petite pension de retraite qu’il va pouvoir liquider et qui va s’ajouter à la première principale. Donc, ça, c’est un point assez important.
Avant de passer la parole à Céline et pour faire la transition avec sa partie, il y a quand même un impact de la réforme des retraites indépendamment du volet emploi des seniors et parce que c’est vraiment quelque chose de très important d’avoir une cartographie de ces salariés seniors pour pouvoir mieux les gérer. Il y a aussi tous les impacts un peu en direct qu’on va avoir de la réforme des retraites, et notamment sur nos dispositifs de protection sociale complémentaire. Alors, en prévoyance, ils auraient été impactés par la réforme, comme je vous l’ai indiqué tout à l’heure, comme les invalides vont toujours pouvoir partir à 62 ans ça ne va pas changer les prévisions qu’on avait faites dans les comptes du contrat d’assurance, et ça ne va pas finalement imposer aux assureurs de constituer des provisions supplémentaires qui auraient nécessité des cotisations supplémentaires à payer de votre côté. Du côté des entreprises cependant il y a clairement des incidences indirectes puisqu’à partir du moment où vous faites travailler les gens deux ans de plus il y a beaucoup plus de probabilité de survenance de sinistre donc, l’arrêt de travail, l’invalidité, mais aussi la consommation de frais de santé, et donc nécessairement il y aura des augmentations sur les contrats frais de santé prévoyance. On sait que les assureurs y réfléchissent déjà, donc il faut s’y attendre. En revanche, il y a un effet un peu plus vertueux sur la retraite supplémentaire, c’est que si on cotise un peu plus longtemps, on est censé avoir une amélioration des rendements pour les régimes de retraite à cotisations définies et aussi de retraite à prestations définies dont va vous parler Céline juste après, puisque là encore on a vu que la retraite de base ne génère pas énormément de droits, c’est-à-dire que quand on compare ce que va nous donner l’État avec ce qu’on gagnait juste avant de partir à la retraite, il y a ce qu’on appelle un taux de remplacement qui est très faible, d’où un besoin de compensation par des dispositifs d’entreprise, et pas que pour les cadres, parce qu’il faut absolument être très conscient du fait que la retraite supplémentaire aujourd’hui, ce n’est pas que le sujet des cadres, c’est le sujet de tous les salariés.
Géraldine
Merci beaucoup Julie. Céline, je te laisse nous parler du PERO.
Céline
Alors je vais vous parler du Pero et de ce qu’est le PERO.
Juste pour revenir sur deux-trois éléments de contexte que Julie a déjà évoqués, mais les systèmes de retraite sont étroitement liés à la démographie. En fait, les modèles mis en place nécessitaient un équilibre intergénérationnel qui est un peu chahuté pour deux principales raisons.
La première c’est l’évolution de notre modèle de société, on entre dans la vie active plus tard, donc peut-être qu’on cotise moins longtemps ensuite c’est le fait qu’on a une espérance de vie qui augmente, et qui augmente même à la retraite. Aujourd’hui, les tables d’espérance de vie tablent sur 30 ans d’espérance de vie lorsqu’on liquide sa retraite. Ce sont des tables qui se sont bien allongées depuis ces 20 dernières années. Et au-delà de ça, cet équilibre intergénérationnel, il est aussi chahuté parce que, comme l’a évoqué tout à l’heure Julie, en 1960, il y avait quatre actifs pour financer un retraité. Aujourd’hui on est autour de 1,5 à 1,4 actifs, et les prévisions ne sont pas très favorables pour une amélioration de ce rapport. Donc on n’est pas à la dernière réforme des retraites, et ces réformes des régimes obligatoires ne visent pas à améliorer les retraites futures, mais plutôt à sauvegarder le régime par répartition. Comme l’a mentionné Julie il s’agit du fameux taux de remplacement, c’est-à-dire le revenu que nous aurons à la retraite par rapport au revenu que nous avions en fin de carrière. Ces éléments diffèrent pour les cadres et les non-cadres, car les régimes obligatoires sont plafonnés à un salaire équivalent à la tranche A des salaires. Ainsi, plus le salaire est élevé et dépasse ce plafond, plus le taux de remplacement diminue. Cela est plus flagrant chez les cadres que chez les non-cadres, mais nous constatons cette diminution pour les deux populations. Les régimes obligatoires actuels seront sauvegardés au fur et à mesure des réformes, mais cela n’améliorera certainement pas le niveau de vie de nos futurs retraités.
En revenant à ce que nous avons vu, les réformes touchent principalement les premiers piliers, c’est-à-dire les régimes de retraite par répartition. Je vais maintenant mettre l’accent sur les régimes de retraite par capitalisation, qui sont des régimes privés auprès d’assureurs et peuvent être collectifs ou individuels. L’objet de notre discussion aujourd’hui concerne spécifiquement les régimes collectifs qui peuvent être mis en place au sein des entreprises, comme le fameux plan d’épargne entreprise. Ce plan a fait l’objet d’une réforme en 2019, dans le cadre de la loi Pacte initiée par le président Macron. Bien qu’elle soit une loi économique à l’origine, cette réforme visait à faire évoluer les régimes de retraite par capitalisation en se basant sur quatre grands principes : renforcer l’intérêt des Français pour l’épargne à long terme, détourner une partie de l’épargne des livrets A, harmoniser et simplifier les systèmes existants entre l’individuel et le collectif, et prendre en compte le fait qu’un français n’a pas une carrière linéaire, mais peut avoir plusieurs systèmes sociaux auxquels il peut être travailleur en salarié, puis revenir en entreprise, puis avoir des régimes collectifs, puis avoir besoin de régimes individuels. Harmoniser ces systèmes-là était très compliqué. Donc, il a voulu aussi créer des passerelles pour regrouper et transférer les différents systèmes d’épargne retraite, pour simplifier la liquidation à la fin auprès d’un seul organisme. Vous verrez aussi, je vais vous montrer tout à l’heure, qu’il a voulu simplifier et ouvrir davantage les modalités d’alimentation de ces régimes, et simplifier les modalités de sortie via ce qu’on appelle les trois compartiments.
Une fois que cette loi est sortie, les assureurs se sont adaptés pour créer ces fameux PER (Plan d’Épargne Retraite) avec trois compartiments, C1, C2 et C3. Ces trois compartiments, on les mêmes numéros quel que soit l’assureur. L’avantage était aussi au terme d’alimentation de ces compartiments, ce qui était connu dans les régimes précédents qu’on appelait les régimes à cotisations définies ou les articles 83 de l’article du Code Général des Impôts. Autour ces régimes continuent d’exister avec ce C3 qui est le versement obligatoire, qui est donc celui qui est négocié dans l’entreprise et qui accueille le financement de l’employeur, voire du collaborateur s’il y a un co-financement de cette cotisation obligatoire qui passe donc par les fiches de paie.
Mais il y a aussi deux autres compartiments, le compartiment C1 qui existe depuis la loi Fillon, qui sont les versements volontaires ou ce qu’on appelle aussi les vifs. Cela permet aux salariés de pouvoir compléter les versements du compartiment C3 par des versements volontaires réguliers ou ponctuels, mais sur lesquels ils ont la main et qui rentrent dans une enveloppe de défiscalisation lorsqu’on fait nos déclarations individuelles d’impôts on connaît son enveloppe de crédit d’impôt autour des régimes de retraite, donc ces versements volontaires permettent une défiscalisation.
Il y a surtout ce nouveau compartiment, le C2, qui lorsque l’on a voulu avoir une harmonisation entre les différents systèmes, a permis ce qui existait sur le PERCO précédemment et n’existait pas sur l’article 83. Il permet d’avoir une passerelle avec l’épargne salariale et de pouvoir alimenter son système de retraite individuel par de l’intéressement ou par des versements liés à l’épargne salariale. La différence aussi, qui existe depuis peu avec ce PER, c’est la possibilité beaucoup plus grande de sortir en capital, donc pas seulement sur le compartiment C3 qui sort majoritairement en rente, puisque l’objectif du versement de l’employeur c’est de l’assimiler à de la rémunération différée et donc de pouvoir apporter de la rémunération à la retraite et donc de la rente à la retraite. Sauf lorsque cette rente est vraiment ridiculement petite et ne présente pas un intérêt d’être versée sous forme de rente mensuelle ou trimestrielle, elle peut être versée en capital.
Et après, sur les compartiments C1 et C2 la liberté est laissée aux salariés de faire des choix et de dire « Je sors en rente » ou « Je sors en capital » ou « Je mixe un peu les deux », et de pouvoir reprendre la main et la liberté sur ce qui est souhaité à la retraite. Donc ça, c’est la grande nouveauté et c’est ce qui lève quelques freins qu’on pouvait avoir sur les régimes précédents. Lorsqu’on veut mettre en place un régime collectif en entreprise, on a affaire à des collaborateurs qui ont des âges très différents. On a affaire à des jeunes qui considèrent qu’ils ont d’autres choix à fouetter que de penser à leur retraite et qui préfèrent épargner pour investir dans l’immobilier. Et puis on avait des gens qui avaient 50 ans passés et qui disaient, « C’est trop tard pour moi, même si je cotise, de toute façon, je vais avoir une rente ridicule. » Eh maintenant on peut répondre à ces différents profils de salariés, et chacun va pouvoir, en fonction de ses besoins, en fonction de son épargne, en fonction des simulations qu’il a faites sur sa retraite, pouvoir venir compléter aussi individuellement ces retraites et les sortir sous forme de rente, sous forme de capital, en fonction des besoins. Donc ça, c’est quand même la grande nouveauté qui est liée avec ce PER.
Donc comment ça se met en place ? Ça reste un régime dit catégoriel, c’est-à-dire qu’on respecte des catégories objectives qui ressemblent à ce qu’on connaît en prévoyance ou en mutuelle. C’est-à-dire que ce sont souvent des régimes cadres ou non cadres ou ensemble du personnel. Ce sont des régimes obligatoires donc, sur le compartiment C3. Le taux de cotisation sera le même pour l’ensemble de la catégorie qui sera concernée par le régime, même s’il peut y avoir des possibilités d’avoir des taux de cotisations différents par tranche de salaire, et ça, ça peut être intéressant par rapport aux besoins de compléter peut-être davantage les tranches de salaire qui ne sont pas concernées par les régimes obligatoires dont on a vu le détail tout à l’heure.
Il est avantageux pour l’employeur, parce que, comme sur les régimes article 83 qui existaient précédemment, ou comme les régimes de prévoyance et de santé, toutes les cotisations de l’employeur rentrent dans la possibilité d’être déduites comme des charges sociales. Et pour toute la partie financée par le salarié, que ce soit dans la part de la cotisation obligatoire ou dans les versements volontaires, ça rentre aussi dans la déduction fiscale de l’impôt sur les revenus. Et il est complet par rapport à ce qui existait précédemment, parce que via les transferts. Il peut venir alimenter l’enveloppe globale via les transferts des régimes précédents, individuels ou collectifs. Et surtout, via ces trois compartiments, il y a des possibilités de mixer en rente ou en capital, et donc de lever certains freins qui pouvaient exister précédemment.
Pour l’entreprise, comment valoriser ces systèmes qui peuvent être mis en place dans l’entreprise ? C’est un vrai système pour fidéliser les salariés et les cadres. Ils sont extrêmement sensibles, puisque c’est vraiment de plus en plus assimilé à de la rémunération différée, et ça rentre de plus en plus dans les négociations annuelles des salaires. En tout cas, tous nos clients nous en parlent assez régulièrement. Et peuvent être mixées entre des augmentations de salaire et les mises en place de ces systèmes-là.
Vous avez une maîtrise du budget, puisque le budget, c’est celui que vous voudrez y mettre. Même si il y a un plafond, quand on arrive à pouvoir y mettre 5% de la masse salariale, c’est que déjà on a des beaux budgets. Il n’y a pas de frais supplémentaires ou de revisite de ces budgets-là, comme on peut le voir en prévoyance et en santé.
Et la facilité de les mettre en place, puisque c’est souvent mis en place par décision unilatérale de l’employeur. Même si j’ai vu récemment des régimes qui ont été mis en place par accord collectif, et ça, ça fait vraiment plaisir. Ça veut dire que les partenaires sociaux sont demandeurs de ces régimes-là, sont sensibles à la nécessité de cotiser longtemps et à des régimes complémentaires. Et il y a moins de boucliers qui se lèvent en disant que le régime de retraite, c’est de la répartition. On voit bien que ça ne suffit plus pour le salarié. L’avantage c’est que ça va lui apporter un complément de revenu à la retraite. Et on voit qu’il va falloir bien compléter ses revenus. Aujourd’hui, on peut le compléter en investissant dans l’immobilier ou en investissant dans de l’assurance vie. Là, c’est un régime qui est mis en place dans les entreprises, donc avec un financement apporté par l’entreprise aussi, d’où l’intérêt de le mettre en place de façon collective. Les versements facultatifs lorsqu’ils sont mis en place, les assureurs sollicitent assez régulièrement au moment des épargnes salariales, au moment de la déclaration fiscale de fin d’année, pour alerter sur l’intérêt de faire des versements facultatifs et sur le regroupement de toutes les parts d’une retraite. Et puis, ça reste une retraite modulable, et ça veut dire qu’avec ce nouveau système, il y a un dialogue social qui s’instaure aussi dans les entreprises, et que les salariés doivent prendre conscience que la retraite ne se subit plus, mais qu’elle est aussi un choix individuel. Et que les collaborateurs doivent reprendre la main sur leur retraite future et sur toutes les possibilités que peuvent apporter aujourd’hui les plans d’épargne par capitalisation.
Donc j’ai surtout évoqué le PERO, il existe bien d’autres systèmes même en entreprise, mais c’était vraiment pour compléter la démonstration qu’a faite Julie sur la réforme des retraites. La réforme concerne aujourd’hui uniquement le premier pilier de la sécurité sociale, qui apporte un revenu, j’allais dire au maximum à 1500 euros, même pour des cadres. Et on voit bien qu’il y a nécessité, même si les régimes par points de l’ARCCO et de l’AGIRC viennent compléter un peu celui qui n’a cotisé à aucun régime, mais aucun système d’épargne en complément va se retrouver très malheureusement déçu par son régime de retraite.
Donc voilà, ce n’était pas pour vous plomber, c’était pour montrer qu’il y a d’autres solutions en entreprise, essentiellement parce que c’est en collectif qu’on peut obtenir des régimes avec des frais négociés, avec des rendements bien meilleurs que sur les solutions purement individuelles. Donc n’hésitez pas à en parler dans vos NAO et d’en parler avec vos partenaires sociaux et vos collaborateurs. C’est un sujet d’actualité et ça peut être un vrai sujet d’attractivité et de package social. Voilà ce que je pouvais vous en dire.
Géraldine
Je voulais vous remercier, Julie et Céline, pour avoir animé ce webinar avec moi. Je vous souhaite une bonne journée.
Céline
Merci à tous.
Julie
Au revoir.