Plan de sauvegarde de l’emploi en matière de licenciement économique

Synthèse des dernières décisions rendues

La mise en œuvre d’un licenciement économique collectif peut donner lieu à la mise en place d’un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE).

1. Élaboration du plan de sauvegarde de l’emploi (PSE)

Le plan de sauvegarde de l’emploi est un dispositif spécifique aux licenciements pour motif économique, au sein des entreprises d’au moins 50 salariés, lorsqu’elles envisagent le licenciement d’au moins dix salariés sur une même période de 30 jours (article L. 1233-61 du Code du travail).

Le plan de sauvegarde peut être établi de manière concertée, dans le cadre d’un accord collectif (article L. 1233-24-1 du Code du travail). Il peut aussi être élaboré unilatéralement par l’employeur (article L. 1233-24-4 du code du travail).

Dans un arrêt du 19 décembre 2023, le Conseil d’État a précisé qu’il n’y a pas lieu de définir de catégories professionnelles au sein du PSE lorsque tous les emplois sont supprimés en raison de la cessation de l’activité de l’entreprise.
Rappelons que si, en vertu de l’article L. 1233-57-3 du Code du travail, il appartient en principe à l’administration, lorsqu’elle est saisie d’une demande d’homologation d’un document qui fixe les catégories professionnelles, de s’assurer, au vu de l’ensemble des éléments qui lui sont soumis, notamment des échanges avec le comité social et économique (CSE) au cours de la procédure d’information et de consultation ainsi que des justifications qu’il appartient à l’employeur de fournir, que ces catégories regroupent l’ensemble des salariés qui exercent, au sein de l’entreprise, des fonctions de même nature supposant une formation professionnelle commune, la définition de telles catégories professionnelles n’a d’objet que si l’employeur doit faire un choix parmi les salariés à licencier.

Tel n’est pas le cas lorsque tous les emplois d’une entreprise sont supprimés, en raison de la cessation totale et définitive de l’activité de l’entreprise.

CE, 19 décembre 2023, n° 465656

2. Nouvelles perspectives légales

Dans une autre décision datée du même jour, le Conseil d’État rappelle l’absence de lien entre régularité de la procédure de consultation du CSE sur un PSE et la consultation sur les orientations stratégiques.

La procédure d’information et de consultation du CSE sur les orientations stratégiques de l’entreprise, dont le contrôle relève de la compétence du juge judiciaire, est distincte de la procédure d’information et de consultation de cet organisme dans le cadre d’un projet de licenciement collectif pour motif économique impliquant l’adoption d’un plan de sauvegarde de l’emploi. Elle est, par ailleurs, sans incidence sur la régularité de celle-ci.

CE, 19 décembre 2023, n° 465656

3. Mesures de prévention dans un accord collectif

Dans une troisième décision, le Conseil ajoute que les mesures de prévention des conséquences de la réorganisation de l’entreprise sur la santé ou la sécurité des travailleurs peuvent être fixées dans un accord collectif.
S’il incombe à l’employeur de prendre des mesures pour prévenir les conséquences de la réorganisation de l’entreprise sur la santé ou la sécurité des travailleurs et de les mettre en œuvre, il est loisible aux signataires d’un accord collectif majoritaire fixant le PSE de cette entreprise, d’adopter de telles mesures eu égard à la liberté contractuelle qui découle de la Constitution.

Ces mesures peuvent figurer en tout ou partie dans l’accord collectif.

CE, 19 décembre 2023, 458434

4. Contrôle de l’administration sur les mesures de prévention

Quant au contrôle de l’administration sur un accord majoritaire fixant les mesures de prévention des conséquences de la réorganisation de l’entreprise sur la santé ou la sécurité des travailleurs, le Conseil d’Etat précise que :
S’agissant du contrôle du respect, par l’employeur, de ses obligations en matière de prévention des risques pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs, en premier lieu, il incombe à l’administration, dans le cadre de son contrôle global de la régularité de la procédure d’information et de consultation, de vérifier que l’employeur a adressé au CSE, avec la convocation à sa première réunion, ainsi que, le cas échéant, en réponse à des demandes exprimées par le comité ou à des observations ou des injonctions formulées par l’administration, parmi tous les éléments utiles qu’il doit lui transmettre pour qu’il formule ses deux avis en toute connaissance de cause :

  • des éléments relatifs à l’identification et à l’évaluation des conséquences de la réorganisation de l’entreprise sur la santé ou la sécurité des travailleurs ;
  • ainsi que, en présence de telles conséquences, les actions projetées pour les prévenir et en protéger les travailleurs, de façon à assurer leur sécurité et protéger leur santé physique et mentale.

À cet égard, lorsque l’accord collectif majoritaire fixant le PSE soumis à validation porte notamment sur les conséquences de la réorganisation de l’entreprise sur la santé ou la sécurité des travailleurs, l’administration doit seulement vérifier la régularité de l’information du CSE sur ces éléments, ainsi qu’il résulte des dispositions du I de l’article L. 1233-30 du code du travail.

5. Rôle de l’accord majoritaire dans le PSE

En second lieu, dans le cadre du contrôle de l’accord majoritaire portant PSE, l’administration doit vérifier, si la réorganisation présente des risques pour la santé ou la sécurité des travailleurs, si l’employeur a arrêté des actions pour y remédier et si celles-ci correspondent à des mesures précises et concrètes, au nombre de celles prévues aux articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du Code du travail, qui, prises dans leur ensemble, sont, au regard de ces risques, propres à les prévenir et à en protéger les travailleurs.

À cet égard, l’administration, afin de s’assurer que ces exigences sont satisfaites, doit accorder une importance toute particulière à la circonstance que l’accord collectif majoritaire portant PSE comporte, le cas échéant, de telles mesures.
L’existence de tels risques s’apprécie :

  • au vu d’abord de ces éléments d’identification et d’évaluation des risques,
  • des débats qui se sont déroulés au sein du CSE,
  • des échanges d’informations,
  • et des observations et injonctions éventuelles formulées lors de l’élaboration du PSE.

CE, 19 décembre 2023, 458434

6. Homologation du PSE et application de l’article L. 1224-1 du Code du travail

Enfin, l’autorité administrative saisie d’une demande d’homologation d’un PSE n’a pas à contrôler l’application de l’article L. 1224-1 du Code du travail.
Tel est l’apport de la dernière décision rendue le 19 décembre 2023 sur le sujet.
Il n’appartient pas à l’autorité administrative statuant sur une demande d’homologation d’un document unilatéral portant plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) de vérifier la bonne application de l’article L. 1224-1 du Code du travail, selon lequel tous les contrats de travail en cours au jour d’une modification dans la situation juridique de l’employeur subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l’entreprise. Le moyen tiré de sa méconnaissance est donc inopérant à l’appui de la contestation de la décision d’homologation.

CE, 19 décembre 2023, n° 467283

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Article rédigé par La Team Capstan avocats

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