Focus RH et obligations légales
Chaque semaine, retrouvez un article de notre partenaire, le Cabinet Capstan Avocats, dédié aux obligations et réglementations en entreprise.
Aquisition des RTT
Les absences du salarié diminuent-elles le nombre de jour de réduction du temps de travail ?
Rappel des lois Aubry sur l’aménagement du temps de travail
Telle était la question posée à la Cour de cassation, qui y répond par l’affirmative dans un arrêt récent du 30 mars 2022, et se prononce clairement en faveur d’une logique d’acquisition des jours de RTT, et non d’une logique forfaitaire.
Cette thématique est l’occasion de rappeler que dans le cadre de la réduction du travail à 35 heures, ce sont les lois Aubry du 13 juin 1998 (Loi n°98-461) et du 19 janvier 2000 (Loi n°2000-37) qui ont instauré différents dispositifs d’aménagement du temps de travail, prévoyant un passage progressif de la durée légale hebdomadaire de travail de 39 heures à 35 heure.
Au titre de ces dispositifs figurent celui des jours de réduction du temps de travail (dits JRTT).
Concrètement par ce système, l’employeur compense par l’octroi de jours de repos, la réalisation d’heures de travail effectif au-delà de la durée légale ou conventionnelle de travail.
Il n’existe donc pas d’heures supplémentaires sur la période de référence car chaque heure excédentaire est compensée par une heure de repos ; le salarié étant réputé accomplir 35 heures en moyenne sur la période de référence, et est rémunéré sur cette base.
Quels sont les 2 types de RTT ?
Soulignons également qu’il existe deux types de JRTT :
- Les JRTT acquis et pris sur une période de quatre semaines, qui ne nécessitent pas la conclusion d’un accord collectif de branche étendu ou d’entreprise (il peut donc être mis en place par simple décision de l’employeur),
- Les JRTT acquis et pris sur une année, ici le dispositif doit obligatoirement être mis en place par accord de branche ou d’entreprise.
S’il est à noter que la Loi du 20 août 2008 (Loi n°2008-789) a supprimé en tant que dispositif spécifique le régime des JRTT, les accords avant cette loi restent en vigueur, et continuent de susciter un certain nombre de litiges au sein des prétoires français.
Absence et RTT, que dit la loi ?
Les divergences de vues portent dans bien des cas sur les conséquences d’une non-prise des JRTT, ou sur la manière dont il faut décompter les heures supplémentaires, ou encore sur l’impact des absences sur le nombre de JRTT.
Sur ce dernier point, par principe, toutes les absences font varier à la baisse le nombre de JRTT (arrêt maladie/ accident du travail, congé maternité ou d’adoption), sauf disposition conventionnelle contraire.
Toutefois, certaines absences sont assimilées légalement par la loi à du temps de travail effectif pour l’acquisition des JRTTT (comme les temps de formation).
Le présent arrêt a été l’occasion pour la Cour de cassation de trancher la question de savoir si le nombre de jours de RTT répond à une logique forfaitaire ou acquisitive.
En l’espèce, un accord collectif portant sur la réduction de la durée du travail prévoyait l’octroi de 10 jours de RTT par année civile au bénéfice des salariés.
Un salarié s’était vu allouer un nombre de jours de RTT réduit à proportion de ses absences. Il avait été absent plus de quatre mois sur l’année pour maladie.
Le salarié reprochait à son employeur d’avoir diminué le nombre de JRTT, faisant valoir qu’en l’absence de précision dans l’accord, le nombre de jours de RTT devait être entendu forfaitairement, de sorte que les absences survenant en cours d’année étaient sans impact sur le nombre de jours acquis.
L’employeur faisait valoir quant à lui que la détermination du nombre de JRTT acquis au titre d’un accord de réduction du temps de travail dépend, par principe, du nombre d’heures de travail effectif effectuées au-delà de la durée légale de travail. La réduction du nombre de JRTT à proportion des jours d’arrêt maladie ne saurait donc être mise en cause.
La Cour de cassation donne ici raison à l’employeur.
La Haute juridiction rappelle dans la présente affaire que les jours de réduction du temps de travail ayant pour objet de compenser les heures accomplies au-delà de la durée légale ou conventionnelle de travail, c’est à bon droit que :
- Le nombre de jours de RTT doit être réduit à proportion des absences non assimilables à du temps de travail effectif ;
- Le salarié absent pour cause de maladie ne peut donc pas prétendre à l’intégralité des jours de RTT.
La Cour de cassation se prononce donc sans ambiguïté en faveur d’une logique acquisitive des jours de RTT.
Toutefois, il convient en pratique de redoubler de vigilance en prenant soin de vérifier le contenu des accords ou des usages d’entreprise relatifs à la durée du travail, car ceux-ci peuvent prévoir que les salariés continuent d’acquérir des jours de RTT pour ce type d’absence.
La prudence est de mise pour éviter tout litige ayant pour objet un rappel de salaire, ainsi qu’une éventuelle demande liée à la réparation du préjudice subi par le salarié.
Cass. Soc, 30 mars 2022, n°21-10917