FOCUS : Action en justice d’un syndicat
Synthèse des dernières décisions rendues par la Cour de cassation

Cette semaine, deux principales décisions rendues en la matière par la Cour de cassation sont décryptées.

1/ Le syndicat peut demander la suspension du règlement intérieur en référé…

Conformément à l’article L.2132-3 du Code de la route, « les syndicats professionnels ont le droit d’agir en justice. Ils peuvent, devant toutes les juridictions, exercer tous les droits réservés à la partie civile concernant les faits portant un préjudice direct ou indirect à l’intérêt collectif de la profession qu’ils représentent. »
Il résulte donc du texte précité que, un syndicat est recevable à demander en référé que soit suspendu le règlement intérieur d’une entreprise en raison du défaut d’accomplissement par l’employeur des formalités substantielles prévues par ledit code (art. L. 1321-4), en l’absence desquelles le règlement intérieur ne peut être introduit, dès lors que le non-respect de ces formalités porte un préjudice à l’intérêt collectif de la profession qu’il représente.
C’est en ce sens que la Cour de cassation s’est prononcée dans une décision du 23 octobre 2024 (pourvoi n°22-19726).
Les faits étaient les suivants : Selon l’arrêt attaqué (Versailles, 2 juin 2022), un salarié a été engagé en qualité de technicien de maintenance, le 12 mars 2001, par la société Schindler.
Par lettre du 19 octobre 2011, il s’est vu notifier une mise à pied disciplinaire de deux jours.
Le salarié a saisi la juridiction prud’homale, le 12 juillet 2016, de demandes tendant à obtenir l’annulation de la mise à pied, le remboursement des retenues effectuées par la société à ce titre et diverses sommes à titre de dommages-intérêts. Le syndicat CGT Schindler est intervenu volontairement à l’instance.
Réponse de la Cour :
Aux termes de l’article L. 1321-4 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance n° 2017-1386 du 22 septembre 2017, le règlement intérieur ne peut être introduit qu’après avoir été soumis à l’avis du comité d’entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel ainsi que, pour les matières relevant de sa compétence, à l’avis du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail.
Le règlement intérieur indique la date de son entrée en vigueur. Cette date doit être postérieure d’un mois à l’accomplissement des formalités de dépôt et de publicité. En même temps qu’il fait l’objet des mesures de publicité, le règlement intérieur, accompagné de l’avis du comité d’entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel et, le cas échéant, du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail, est communiqué à l’inspecteur du travail.
Ces dispositions s’appliquent également en cas de modification ou de retrait des clauses du règlement intérieur.

Il résulte de ce texte que le règlement intérieur ne peut entrer en vigueur dans une entreprise et être opposé à un salarié dans un litige individuel que si l’employeur a accompli les diligences prévues par l’article L. 1321-4 du code du travail qui constituent des formalités substantielles protectrices de l’intérêt des salariés.

Aux termes de l’article L. 2132-3 du même code, les syndicats professionnels ont le droit d’agir en justice. Ils peuvent, devant toutes les juridictions, exercer tous les droits réservés à la partie civile concernant les faits portant un préjudice direct ou indirect à l’intérêt collectif de la profession qu’ils représentent.

2/… mais le syndicat ne peut pas demander la nullité du règlement intérieur au fond !

Dans le cadre de son action judiciaire, un syndicat n’est pas recevable à demander au juge statuant au fond la nullité de l’ensemble du règlement intérieur ou son inopposabilité à tous les salariés de l’entreprise, en raison du défaut d’accomplissement par l’employeur des formalités substantielles prévues par le code du travail (art. L. 1321-4). Telle est la précision apportée par la Cour de cassation (même décision qu’au-dessus, pourvoi n°22-19.726).

3/ L’action d’un syndicat ne peut faire ordonner des reconstitutions de carrières et rattrapages salariaux

Tel est l’apport de cette décision rendue par la Cour de cassation le 6 novembre 2024 (pourvoi n°22-17106).

Il résulte du code du travail que si un syndicat peut agir en justice pour faire reconnaître l’existence d’une irrégularité commise par l’employeur au regard de dispositions légales, réglementaires ou conventionnelles ou au regard du principe d’égalité de traitement et demander, outre l’allocation de dommages-intérêts en réparation du préjudice ainsi causé à l’intérêt collectif de la profession, qu’il soit enjoint à l’employeur de mettre fin à l’irrégularité constatée, le cas échéant sous astreinte, il ne peut prétendre obtenir du juge qu’il condamne l’employeur à régulariser la situation individuelle des salariés concernés, une telle action relevant de la liberté personnelle de chaque salarié de conduire la défense de ses intérêts.
Dès lors, fait une exacte application de ce texte la cour d’appel qui juge que relève de la défense de l’intérêt collectif l’action d’un syndicat tendant à faire constater la violation par l’employeur d’un accord collectif et à enjoindre à celui-ci de respecter ledit accord.

En revanche, encourt la cassation la cour d’appel qui, sur demande d’un syndicat, ordonne à l’employeur de repositionner les salariés concernés à compter d’une certaine date à un niveau d’échelon correspondant à leur ancienneté conformément à la mesure contenue dans un accord collectif, à reconstituer leur carrière et à procéder à un rattrapage salarial, dès lors que cette action collective tend à la régularisation de la situation individuelle des salariés concernés.

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Article rédigé par La Team Capstan avocats

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